Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Presentation

  • : HALIDI-BLOG-COMORES, Blog des COMORES
  • : BLOG DES COMORES GERE DEPUIS LE 01 DECEMBRE 2013 PAR MARIAMA HALIDI
  • Contact

A SAVOIR

QU'EST CE QUE LA LANGUE COMORIENNE ?

Pour répondre à cette question pertinente, nous vous proposons ci- dessous l'interview du grand linguiste et spécialiste de la langue comorienne, Mohamed-Ahmed Chamanga

 

 
INTERVIEW DE CHAMANGA PAR RFO EN 2004
 
 
 Le comorien est une langue composée de mots africains, de mots arabes voire parfois de mots portugais et anglais. D'où vient la langue comorienne ?

M.A.C : Le fonds lexical de la langue comorienne est essentiellement « africain » comme vous le dites, et plus précisément bantu. Les emprunts au portugais ou à l'anglais sont relativement faibles. Par contre, l'apport arabe est très important. Cela s'explique par la très forte islamisation des Comores, depuis la Grande Comore(Ngazidja) jusqu'à Mayotte (Maore) en passant par Mohéli (Mwali)et Anjouan (Ndzuwani). Malgré ces emprunts, le comorien (shikomor) reste, sur le plan de sa structure grammaticale, une langue bantu.

Qu'appelle t-on une langue bantu ?

M.A.C : Le bantu est une famille de langues, la plus importante d'Afrique. Les langues qui composent cette famille couvrent pratiquement toute la partie australe du continent noir.

Y a t-il encore aujourd'hui en Afrique ou à Madagascar des populations qui parlent une langue similaire au comorien ?

M.A.C : Bien sûr ! On trouve par exemple le swahili en Tanzanie, le lingala au Congo Démocratique, le kikongo au Congo, le zulu en Afrique du Sud, le shona au Zimbabwe-Mozambique, le tswana au Botswana, le kinyarwanda-kirundi au Rwanda-Burundi, etc. Comme ces langues appartiennent à la même famille, elles ont forcément beaucoup de points communs dans la structure des mots, leurs répartitions dans les phrases, les accords grammaticaux, etc. Elles ont aussi un minimum de vocabulaire commun.
Prenons par exemple le mot bantu ! Ce mot est attesté dans certaines langues, comme le lingala, et il signifie « hommes ». C'est le pluriel du mot muntu qui veut dire « homme » au singulier. Dans d'autres langues, ces mots se déclinent au pluriel en watu (swahili), wantru ou watru ou en encore wandru (shikomor) ; au singulier, nous avons respectivement mtu, muntru, mtru, mndru.
Prenons encore l'exemple de la phrase kinyarwanda suivante qui signifie : « Combien d'hommes ? » : Abantu bangahe ? Nous avons en comorien les équivalences suivantes :Wantru wangapvi ?Watru wangapvi ?Wandru wanga(pvi) ? et en swahili :watu wangapi ?

Ne pensez-vous pas qu'il y a beaucoup de ressemblance dans tout ça ?

M.A.C : A Madagascar, jusqu'au milieu du XXe siècle, il y avait quelques poches bantuphones sur la côte nord-ouest. Mais les langues africaines qui y étaient parlées, le swahili à Marodoka ou le makua à Maintirano, ont aujourd'hui disparu. Le malgache appartient à une autre famille de langues : les langues austronésiennes comme par exemple les langues indonésiennes.

Le comorien est souvent comparé au swahili, parfois on a même dit que le comorien en était dérivé ?

M.A.C: Selon les résultats des recherches des trois dernières décennies, il est prouvé que le comorien et le swahili sont génétiquement issus d'une même souche-mère, d'où leur très grande parenté. Mais les deux langues se seraient séparées aux environs du XIIème siècle. On peut donc dire que ce sont deux langues soeurs. Si la confusion a pu se maintenir jusqu'à une période pas très lointaine, c'était à cause de la très grande proximité des deux langues, mais aussi parce que les sultans des Comores parlaient swahili et beaucoup de correspondances et traités avec les pays voisins ou les puissances étrangères étaient rédigés en swahili qui étaient à l'époque la plus importante langue de communication et du commerce de cette région de l'océan indien occidental.
Par combien de personnes est parlée la langue comorienne?
M.A.C:On peut estimer que la langue comorienne est parlée aujourd'hui par un million de personnes environ : les 750 000 habitants de l'archipel des Comores plus la très importante diaspora comorienne, que l'on peut retrouver notamment à Madagascar, à Zanzibar ou encore en France.

Est-elle enseignée à l'école ? Si non pourquoi ?

M.A.C: Malheureusement, elle ne l'est pas. Pourquoi ? Parce que : Premièrement, la colonisation française, avec sa mission « civilisatrice », n'avait jamais reconnu au peuple dominé une quelconque culture ou civilisation et que les langues des dominées n'étaient pas des langues mais, avec un sens très péjoratif, des dialectes qui n'avaient ni vocabulaire développé ni grammaire.
Deuxièmement, le pouvoir très centralisateur de l'Etat français avait imposé le français comme la seule langue de l'administration partout. Cela était vrai dans les colonies, mais aussi en métropole. C'est ainsi qu'on a banni l'enseignement du breton en Bretagne, du basque au Pays Basque (Sud-Ouest de la France).
Troisièmement enfin, nous avons nous-mêmes fini par admettre que notre langue est pauvre et sans grammaire. Elle ne peut donc pas être enseigné. Il faut encore souligner qu'avec l'instabilité chronique des Comores indépendantes, aucune réflexion sérieuse n'a pu être menée sur la question. Pourtant, les pédagogues sont unanimes : pour permettre l'épanouissement des enfants, il est nécessaire que ces derniers puissent s'exprimer pleinement dans leur langue maternelle...

Y a t-il une ou des langues comoriennes ?

M.A.C:Nous avons la chance d'avoir une seule langue comorienne, depuis Ngazidja jusqu'à Maore. Mais comme toute langue, le comorien se décline en plusieurs dialectes qui en sont les variantes régionales : le shingazidja à la Grande Comore, le shimwali à Mohéli, le shindzuani à Anjouan et le shimaore à Mayotte.

Comment expliquer l'apparition de divers dialectes sur un territoire aussi exiguë que les Comores ?

M.A.C : Ce phénomène n'est pas spécifique au comorien. Toute langue est formée de plusieurs dialectes. La dialectalisation s'accentue lorsqu'il y a peu de communications et d'échanges entre les régions. A l'inverse, le déplacement d'une population qui parle un dialecte donné vers une autre région où l'on parle un autre dialecte peut également entraîner des changements dans les deux dialectes. Pour le cas des Comores, le facteur du peuplement par vagues successives au cours de l'histoire explique aussi le phénomène.
Les différences dialectales peuvent aussi s'observer à l'intérieur de chaque île. C'est ainsi, par exemple en Grande Comore, que la manière de parler des gens de Mbéni dans la région du Hamahamet diffère du parler des gens de Fumbuni dans la région du Mbadjini. Il en est de même à Anjouan entre les gens de Mutsamudu, sur la côte nord, et ceux du Nyumakele, dans le sud-est de l'île, ou encore, à Mayotte, entre Mamoudzou et Kani Bé ou Mwana-Trindri dans le sud, etc.

Un mot sur la langue mahoraise.

M.A.C:Le shimaore appartient au même sous-groupe dialectal que le shindzuani. C'est dire qu'il faut souvent écouter attentivement pour percevoir les différences entre ces deux dialectes. Le shimaore fait ainsi partie intégrante de la langue comorienne.

Le comorien s'enrichit-il ou s'appauvrit-il (avec le phénomène de créolisation de la langue) ?

M.A.C : Parler à l'heure actuelle de créolisation de la langue comorienne est quelque peu exagéré. Certes elle ingurgite aujourd'hui beaucoup de mots d'origine française. Mais cela reste « raisonnable ». Le comorien a emprunté énormément de vocabulaire d'origine arabe, environ entre 30 et 40 % du lexique, pourtant on ne parle pas de créole arabe, et cela à juste titre. En effet, ce qui fonde une langue, ce ne sont pas seulement les mots. Ce sont surtout sa structure grammaticale et sa syntaxe. De ce point de vue, le comorien ne ressemble ni à l'arabe ni au français.
On ne peut pas dire que le comorien s'appauvrit. Essentiellement oral, il répond parfaitement à nos besoins de communication. Il est toutefois évident qu'une langue écrite possède un stock lexical beaucoup plus étendu qu'une langue orale. Ne vous inquiétez pas pour le comorien. Si un jour, on décide de l'écrire, de l'enseigner et de l'utiliser dans l'administration, il ne pourra que s'enrichir. Il s'enrichira en se forgeant des mots nouveaux ou en empruntant d'autres ailleurs, comme cela se fait dans les langues dites de « grande civilisation ».

Où en est actuellement la recherche sur la langue comorienne ?

M.A.C: La recherche sur la langue comorienne avance ; trop lentement peut-être, mais elle avance. Nous avons aujourd'hui une meilleure connaissance sur elle qu'il y a vingt ans. Malheureusement, c'est un domaine qui intéresse peu de monde, aussi bien chez les nationaux que chez les chercheurs étrangers.

Pensez-vous qu'un jour tous les Comoriens parleront la même langue ? Et sur quoi se fonderait cette sédimentation en une seule langue « nationale » ?

Mohamed Ahmed-Chamanga : Nous parlons déjà la même langue. Ce qui nous manque, c'est une langue standard, comme en Tanzanie avec le swahili, à Madagascar avec le malgache, ou en encore au Zimbabwe avec le shona, etc. Pour arriver à ce stade, il faut qu'il y ait une réelle volonté politique, une prise de conscience chez les Comoriens de vouloir mieux apprivoiser leur propre culture et que soit mise en place une équipe de chercheurs qui se pencherait sur la question et qui proposerait cette langue standard qui serait utilisée dans tout l'archipel des Comores.

Recherche

BIENVENUE SUR MON BLOG

NA MKARIBU HARI MWA YI BLOG YANGU 
Cet outil va me permettre de vous faire decouvrir mon pays natal  et partager quelques unes de mes passions.......à ma façon !!!!
 

Pour revenir à la page d'accueil  cliquez  ICI

Pour recevoir réguliérement les articles que nous diffusons, merci de vous inscrire à la newsletter (Attention : laissez les deux cases (newsletter et articles) cochées) .

Halidi Mariama (HALIDI-BLOG-COMORES)

 

 

 

MESSAGE IMPORTANT :

 

DEPUIS LE 01 DECEMBRE 2013, ALLAOUI HALIDI A CEDE LA RESPONSABILITE DE VOTRE BLOG A MADAME MARIAMA HALIDI.

 

MERCI DE VOTRE FIDELITE

 

 

CI-DESSOUS LES NEWS  RECENTES  DES COMORES

 

 

gala_final-_maquette--2-.jpg

A PROPOS DE OUANI

Ouani et ses grands hommes
 
 
L’être humain est insignifiant puisque le corbeau et beaucoup d’autres espèces d’arbres vivent plus longtemps que lui. De ce court séjour dans ce bas monde à la différence d’autres êtres vivants, l’homme peut marquer de son empreinte l’histoire.
A OUANI, ce genre d’homme malgré sa rareté, a existé et continu à exister jusqu’à nos jours. En ouvrant ce nouveau chapitre, quelques dignitaires en collaboration avec le comité de pilotage de la ville ont tenu à rendre hommage beaucoup d’hommes et de femmes qui ont fait du bien à cette ville.
En dehors de tout jugement, ils ont fait de leur mieux pour que Ouani devienne l’une des grandes villes les plus rayonnantes des Comores et Ouani l’est grâce à eux. Elle doit continuer à l’être pour nous et les générations à venir.
A titre posthume, nous tirons la révérence devant Saïd Toiha (Baco Moegné), Saïd Abdou Bacar Nomane, Saïd Abdou Sidi et Saïd Andria Zafi.
 
Le premier pour avoir créé la première école privée de la ville dans l’objectif de ne plus avoir un enfant de six à sept ans non scolarisé, le second qui a été le premier à être ministre et dont les louanges dépassent les frontières de la ville, le troisième a accompagné plusieurs années la jeunesse et le dernier a beaucoup contribué au niveau de l’enseignement primaire par son dévouement et son engagement à instruire ceux qui l’ont fait pour nous. Cette liste vient de s’ouvrir et n’est pas prête de se fermer ; beaucoup d’autres personnes disparues ou vivant tels que les enseignants apparaîtront à la prochaine édition.
Ansaly Soiffa Abdourrahamane
 
Article paru en 2003 dans le n° 0 de Jouwa, bulletin d’information de OUANI
 
 
 
 
LES ENFANTS DE LA VILLE DE OUANI
ET L’HISTOIRE   DES COMORES
 
 Beaucoup d’enfants de la ville de OUANI ont marqué et marqueront toujours l’histoire de leur pays : les îles Comores.
 
 En voici quelques uns dans différents domaines.
 La liste n’est pas exhaustive
 
 I) LITTERATURE
 
LITTERATURE ORALE
 
ABDEREMANE ABDALLAH dit BAHA PALA
 
Grand connaisseur du passé comorien décédé brusquement en 1988.
Actuellement, un projet de publication de sa biographie est en étude.
On trouve beaucoup de ses témoignages sur l’histoire des Comores dans le tome 2 de l’excellente thèse de SIDI Ainouddine sur la crise foncière à Anjouan soutenue à l’INALCO en 1994 
 
LITTERATURE ECRITE
 
Mohamed Ahmed-CHAMANGA
 
Grand linguiste des Comores
 
 Né à Ouani (Anjouan) en 1952, Mohamed Ahmed-Chamanga, diplômé de swahili et d'arabe, a fait des recherches linguistiques sur sa langue maternelle. Il enseigne la langue et la littérature comorienne à l'Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco). Il est l'auteur d'une thèse, de plusieurs articles, ainsi que d'un recueil de contes de l'île d'Anjouan : Roi, femmes et djinns (CLIF, 1998). Président de l'Association Fraternité Anjouanaise, Mohamed Ahmed-Chamanga a fondé, en 1997, le journal Masiwa.
 Il enseigne actuellement la langue et la littérature comoriennes à l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales de Paris (INALCO).
 
AINOUDINE SIDI
 
 Historien & grand spécialiste de l’histoire foncière des Comores 
 
 Né à OUANI, en 1956. Il a fait des études d’histoire à l’université de DAKAR (SENEGAL) et a préparé un doctorat d’études africaines à l’INALCO (PARIS)  Il est actuellement chercheur et Directeur du CNDRS (Centre National de Documentation et de Recherches Scientifiques) à MORONI.
 
 II) MUSIQUES & CHANTS
 
DHOIFFIR ABDEREMANE
 
Un des fondateurs de l’orchestre JOUJOU des Comores.
Avec ses chansons axées sur la contestation sociale. Il fait partie des premiers artistes qui ont introduit aux années 60 une nouvelle forme de musique aux COMORES.
 
C’est un homme très discret mais plein de talents. On se souviendra toujours de ses productions à la salle AL CAMAR de MORONI.
 
FOUDHOYLA CHAFFI
 
 Une des premières femmes comoriennes à avoir fait partie d’un orchestre musical.
 Il s’agit là d’un engagement incontestable de la part d’une femme comorienne.
 Elle a commencé à jouer un rôle important dans la chanson à partir de 1975 comme chanteuse principale de l’orchestre JOUJOU des Comores.
Sa voix d’or résonne toujours dans le cœur de tous ceux qui ont vécu dans notre pays de 1975 à 1978. On ne passait pas en effet, une seule journée sans entendre une de ses chansons sur l’égalité des sexes, l’unité des Comores, le changement des mentalités… à la radio nationale.
 
 III) POLITIQUE
 
Le sultan ABDALLAH III
 
 De mère ouanienne, il est l’un des grands sultans qui ont régné dans l’archipel des Comores au 18eme siècle et plus précisément sur l’île d’Anjouan.
 
SITTOU RAGHADAT MOHAMED
 
La première femme ministre et élue député des COMORES
 
Né le 06 juillet 1952 à OUANI. Elle a enseigné pendant plusieurs années le français et l’histoire géographie dans différents collèges du pays avant d’être nommée secrétaire d’Etat à la condition féminine et à la population en 1991.
De 1991 à 1996 elle a assumé de hautes responsabilités politiques : Haut commissaire à la condition féminine, Ministres des affaires sociales, conseiller spécial du président de la république, secrétaire général adjoint du gouvernement, élue députée ….
Actuellement, elle est enseignante à l’IFERE et Présidente du FAWECOM.
 
Article publié sur le site de l'AOFFRAC (www.aoffrac.com)
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 

 

12 novembre 2008 3 12 /11 /novembre /2008 23:40

Ci dessous un article intéressant d'Anrmy B

Kamar : Osons la Mobilité Croisée pour Unir la Nation
Anrmy B (Photo)

A l'instar de tous les archipels dans le monde, Kamar [2] a des spécificités propres à son caractère géographique. Les problématiques liées à l'éducation du peuple, la mise en valeur des terres, l'espacement des naissances, la place de la femme, l'information populaire... doivent avoir ici une réponse autre que celle d'un pays continental. Certes, dans un ensemble comme Kamar une politique de décentralisation et d'autonomie est nécessaire, mais elle doit surtout être suivie de mesures poussant le grand comorien à vivre à Mwali, le mohélien à Ndzuani...
De part ce constat, Kamar est donc à la fois spécifique et complexe. Spécifique parce que composé de plusieurs entités insulaires elles même différentes ; Complexe car son positionnement géostratégique à l'entrée du Canal du Mozambique a toujours attisé et attise encore les convoitises des puissants de ce monde.
Vivant dans un monde moderne en perpétuel mouvement, on ne peut qu'être stupéfait par le poids étouffant de fléaux tels que l'immobilisme, le conservatisme et le féodalisme religieux dans la société comorienne. Mais de quelle société comorienne veut-on parler ? Existe-t-il déjà une vraie Nation comorienne unie partageant un même destin ? N'en déplaise à certains, la Nation comorienne n'existe pas encore, elle reste un puzzle non construit. Nous devons tirer la sonnette d'alarme suite aux mouvements séparatistes de 1995 et 1997 [3].Aujourd'hui, les institutions élaborées en 2001, dans l'esprit de créer la stabilité et faire disparaître le cancer du séparatisme ne font qu'enfoncer dans la division la partie indépendante de Kamar [4]. Avec leurs nombreux pôles de décision – 4 exécutifs, 4 parlements -, ces institutions rendent plus complexes la gestion du pays.
Elles minent surtout l'idée d'appartenance à une même Nation par le fait qu'aujourd'hui la gestion d'une île par ses originaires contribue à retenir les gens chez eux.
En réalité, le Peuple comorien ne se connaît pas. Le tourisme et les échanges économiques inter îles sont quasi inexistants sinon nuls. Le village reste encore malheureusement la seule référence du comorien. Ngazidja (la plus grande île de Kamar) et en particuliers la ville de Moroni abrite toutes les capitales (économiques, politiques, culturelles). Les mohéliens et les anjouanais sont donc contraints de s'y rendre régulièrement pour les démarches administratives, pour des soins, pour partir à l'étranger, ou pour travailler tout simplement.

Quel serait aujourd'hui l'intérêt pour un grand comorien d'aller à Mohéli ? Aucun malheureusement.
Il existe plusieurs leviers pour provoquer un sentiment d'union nationale. Cependant, dans le cas de Kamar, plusieurs facteurs freinent la naissance de cet élan national.
C'est de cet immobilisme archaïque, vicieusement maintenu par une pseudo notabilité embourgeoisée et principalement dans l'intérêt d'améliorer le quotidien du peuple comorien que vient germer l'idée de mobilité croisée bien adaptée à la configuration de ce bel archipel.
Naturellement, il ne s'agit pas d'énoncer ici des concepts sociologiques vides de sens, car la mobilité croisée est une notion simple et pragmatique, accessible à tous lorsqu'on en explique les avantages mais aussi quand on propose des mesures concrètes pour sa mise en place.
De mémoire de comorien, seul Le Président Ali Soilih [5] avait conceptualisé mais aussi appliqué cette notion de mobilité croisée. Pendant son mandat « ....Ali va donc s'attacher à se référer, sans cesse, à un concept nouveau pour le citoyen moyen, celui de Nation (Twaïfa)... [...] Et concrètement, il institue, par décret, le 15 octobre 1976, un service national d'une durée de un an, en veillant à ce que le jeune soit affecté, autant que possible, dans une île autre que celle de la naissance... »[6]
Après l'indépendance le 6 juillet 1975, et le départ de l'administration coloniale, Ali Soilih comprend donc qu'il est impératif de créer une Nation et « grâce à son action déterminée, [il] cherche à faire apparaître une conscience et une unité nationales naissantes... » (Voir note 5 bas de page). 33 ans après cette «Indépendance de drapeau», Kamar est toujours à la recherche de cette Unité alors que notre hymne national «Udzima Wa Massiwa» [7] nous le rappelle tous les 6 juillet.
Dans ce contexte inquiétant, comment ne peut-on pas soulever encore le débat sur la mobilité croisée ?
Car mise à part sa capacité à créer enfin une Nation qui se connaît et se respecte dans ses différences, la mobilité croisée sera une grande opportunité pour le développement économique de Kamar. En effet, elle permettra des débouchés réels dans l'immobilier (notion de location de propriétés dans toutes les îles) ; la mise en place d'un tourisme local inter îles ; une meilleure occupation du territoire national (Ndzuani croule sous le poids d'une très forte densité démographique -599 hab. /km2- face à Mwali -118 hab. /km2- qui a un territoire peu occupé). Sans oublier la commercialisation de nos produits sur un marché d'environ 750 000 consommateurs répartis sur 2.236 km2 (économies d'échelle).
Dans ce même état d'esprit, chaque île a ses avantages comparatifs : Pourquoi ne pas promouvoir le bois de Bahani (Ngazidja) ? Comment oublier le goût exquis des bananes vertes et du manioc deOuallah 1 (Mwali) ? Qui connaît la qualité du lait caillé de Nioumakélé (Ndzouani) ? Le sel solaire produit par les femmes de Bandrélé (Maoré) ne bénéficiera t'il pas de meilleurs débouchés commerciaux s'il est promu sur tout le territoire de Kamar (2.236 km2)? Qui connaît l'expertise de Bandrani (Ndzuani) dans la fabrication de galawas [8] ? Pourquoi ne pas aller apprendre des techniques de pêche artisanale du petit village de Chindini dans le sud de Ngazidja ?
Malheureusement tous ces trésors n'ont qu'une visibilité villageoise au mieux régionale. Le premier porte parole pour la promotion des produits locaux, de l'artisanat, des techniques agricoles et halieutiques n'est autre que le peuple mobile sur tout le territoire national.
Il nous faut aussi relever les avantages sociopolitiques qui nous amènent à oser sans tabou ce débat pour L'Union à travers une mobilité croisée adaptée et urgente. Il est plus que logique que ce brassage des populations, cette interpénétration du peuple comorien conduira à une meilleure connaissance et/ou compréhension des idéaux, des pratiques coutumières et religieuses, des problèmes quotidiens, des habitudes alimentaires... présents sur chaque île de Kamar. De la connaissance commune née de cette mobilité, une politique nationale de « compétition intelligente sectorielle » pourra être initiée. Chaque île aura sa spécialité connue de tous dans tel ou tel secteur. Ainsi Ndzuani pourra être spécialisée dans la tomate, la viande bovine, les soins et la beauté ; Mwali dans la banane verte, le poisson et l'écotourisme ; Ngazidja dans la culture du manioc, l'élevage de volaille et la couture d'habits traditionnels ; Maoré le sel solaire, la transformation de produits locaux et la plongée sous marine.

Tous les comoriens -diaspora comprise - amoureux de leur pays, doivent saisir l'importance et l'intérêt qu'ils ont de comprendre et débattre de cette idée simple de mobilité croisée. Une idée essentielle pour que chaque citoyen puisse se sentir chez lui, partout sur tout le territoire national. En relevant ce défi, tous les comoriens contribueront à une Révolution des mentalités et à l'édification effective de la Nation comorienne. Une fois que le comorien connaîtra son territoire, connaîtra surtout la vie du voisin du village d'à côté ou de l'île d'en face, nous balayerons à jamais les démons internes et externes du séparatisme. Il en va de l'Amour entre comoriens, il en va de l'Union de la Nation Kamar...
Quel patriote osera relever ce nouveau défi ?
Anrmy B.
International Economist ; London
anrmy@hotmail.com

Notes :
1 - Ce sont les navigateurs arabes qui ont donné au début du XVIème siècle leur nom à ces Iles situées dans le canal du Mozambique. Ils les appelaient couramment Kamar (Iles de la Lune)
2 - Dans cet article, nous utiliserons les noms authentiques de Ndzuani (Anjouan en français) ; Ngazidja (Grande Comore) ; Mwali (Mohéli) et Maoré (Mayotte)
3 - Le mouvement sécessionniste commence en 1995 à Mwali qui est rejoint par Ndzuani en 1997
4 - Mwali (34 500 h), Ngazidja (293 000 h), Ndzuani (254 000 h) sont indépendantes depuis le 6 juillet 1975.
Maoré (186 000 h) est restée française
5 - Chef d'Etat Révolutionnaire de Kamar du 2 janvier 1976 au 15 mai 1978. Il fut assassiné par Bob Denard.
6 - Extrait de « Ali Swalihi 1976-1977 L'IMPOSTURE » - Djahazi 04 - 2008
7 - Titre de l'hymne de Kamar. Ce titre signifie « Union des Iles »
8 - Pirogues monoxyles à un ou deux balanciers, faites en bois et longues de 3 à 10 mètres. Elles servent à la pêche artisanale dans l'océan indien.
5 concepts simples et concrets pour le succès de la Mobilité Croisée
• Opération Tour inter îles : Pour tous les citoyens de nationalité comorienne réduction de 50% pendant un mois pour se rendre sur une île en avion et/ou bateau// Janvier pour la destination Ndzuani ; Avril pour Mwali ; Août pour Ngazidja et Novembre pour Maoré.
• Opération Foires & Festiv'Iles : Foire des produits du terroir ; Festival de danses traditionnelles ; Foire de l'artisanat ; Foire des produits de la mer.
• Opération Karibou Ramadhan : Profiter de ce mois pour promouvoir et faire découvrir les spécialités culinaires de chaque île.
• Opération I Love Kamar : Choisir de présenter, le même jour et nationalement un même village dans chacune des 4 îles.
• Opération Pieds Pirogues : Marathon inter îles composé d'équipes de jeunes pratiquant 2 disciplines : course à pied et course à pirogue.
---------------------------------
* Né dans l'océan indien aux Kamar, Anrmy B. poursuit des études en Commerce International sous le soleil montpelliérain. Il décroche brillamment aux Etats-Unis (2001) un Master trilingue en Négociation et Gestion de Projets Internationaux.
Son riche parcours professionnel le mène dans les 4 coins du globe. Après Les Canaries, les Etats-Unis, Puerto Rico, La Réunion, L'Espagne, Dubaï il pose aujourd'hui ses valises à Londres où il est chargé du développement stratégiques des marchés hispanophones et francophone d'une grande société américaine.
Très attaché à sa terre natale, il s'engage activement dans des actions humanitaires-en particulier le domaine de l'éducation et la santé. Il a aussi l'honneur d'être membre de la famille Rotaract, la branche jeune du Rotary International.
Partager cet article
Repost0

commentaires

Pages