HALIDI-BLOG-COMORES
UNION DES COMORES
Unité - Solidarité – Développement
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ASSEMBLEE DE L’UNION
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Moroni, le 19 octobre 2007
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Discours d’ouverture de la session Parlementaire Ordinaire d’octobre 2007, prononcé par son Excellence le Président de l’Assemblée de l’Union Monsieur Saïd Dhoifir
BOUNOU,
- Madame et Messieurs les membres du Gouvernement,
- Madame et Messieurs les Représentants du Corps Diplomatique et des
Organismes Internationaux accrédités aux Comores,
- Mes chers collègues députés,
- Honorable assistance.
Assalam Anlaikoum
L’Assemblée Nationale tout entière se sent très honorée de votre présence à cette cérémonie d’ouverture de la session ordinaire d’octobre 2007 et elle vous en
remercie.
Comme vous le savez, l’année 2007 a été pour nous une année de travail intense.
Une session extraordinaire en janvier, une session ordinaire en Avril, suivie de deux sessions extraordinaires l’une de 15 jours en août et l’autre de 3 jours, début
septembre.
Nous voici encore une fois attelés à l’ouvrage pour la session budgétaire, la 5ème session de l’année.
Chaque ouverture et chaque clôture de session a été pour nous une occasion solennelle de nous exprimer sur les grandes questions
nationales et les sujets d’actualité intéressant notre pays et la vie quotidienne de ses habitants.
Nous avons fait beaucoup de suggestions et de propositions qui n’ont jamais été pris en compte.
Comme la situation demeure statique, et les problèmes soulevés toujours actuels, nous sommes contraints d’en reparler même
brièvement, au risque de nous répéter.
Honorable Assistance,
Il est à signaler encore une fois le retard que le gouvernement met à déposer le projet de loi des finances 2008, les délais réglementaires étant de 15 jours avant
l’ouverture de la session qui était initialement prévue pour le 5 octobre et qui a été retardée de 2 semaines en raison du ramadan.
Jusqu’à présent ce projet n’est pas encore déposé. La conséquence d’un tel manquement va être une pression malsaine sur les députés pour adopter à la hâte la loi des finances
2008, prétextant des exigences du FMI et la Banque Mondiale , pour revenir demander sa rectification quelque semaines plus tard au nom des exigences de ces mêmes institutions. A moins que l’effet
recherché ne soit l’adoption par ordonnance du budget après le délai de 60 jours accordé par la Constitution.
A ce propos nous prenons à témoins l’assistance ici présente et le peuple tout entier si des dysfonctionnements ou des retards adviennent dans la gestion de cette session
consacrée principalement à l’étude du budget.
Mesdames et Messieurs,
Cette session budgétaire se tient sous les auspices des incertitudes les plus inquiétantes et qui suscitent de nombreuses questions :
En effet comment faire adopter un projet de loi sur les finances de l’Etat sans Anjouan, alors que le budget doit être consolidé entre les 4 entités Union et îles
autonomes ?
Voter un budget sans Anjouan ne revient il pas à conforter les velléités séparatistes des autorités de fait de cette île dont la volonté d’aller vers une confédération des
Etats se précise progressivement ?
Et puis à quoi sert que l’Assemblée vote un budget dont l’exécution échappe complètement à son contrôle, les mécanismes de contrôle prévues par la loi étant paralysés par la
dépendance administrative et financière de l’Assemblée vis-à-vis de l’exécutif de l’Union ?
Voter un budget sans la possibilité de contrôle de l’action du gouvernement ne revient-il pas à donner carte blanche au gouvernement pour disposer des deniers publics à sa
seule convenance ?
Cette incontrôlabilité du gouvernement qui a toujours existé depuis l’avènement de l’union des Comores, parait aujourd’hui plus flagrante dans la mesure où elle rencontre un
concours de beaucoup de circonstances complexes.
Je n’en rappellerai que 2 exemples pour vous épargner une longue liste.
1ère , l’enlisement du problème d’Anjouan dont le rebondissement actuel est né de la décision du gouvernement de l’Union de reporter par voie d’autorité la date
des élections présidentielles dans la seule île d’Anjouan, malgré l’avis contraire de l’Assemblée qui avait plaidé pour un report global afin de rester dans les dispositions de la loi
électorale.
Ce report a donné le prétexte à une rébellion politique des autorités de fait d’Anjouan, qui ont organisé les élections à la date initiale en même temps que les autres îles,
prétendant se conformer à la loi.
Bien sûr ces élections organisées à Anjouan ont été illégales puisque entre autres elles n’ont pas été supervisées par la Commission nationale Electorale et leurs résultats
n’ont pas été validées et proclamées par la Cour Constitutionnelle..
2ème , il s’agit de la persistance du problème de partage de compétences entre l’Union et les îles, problème devenu chronique et pourtant largement résolu
par des lois votées à la régulière par l’Assemblée, certaines en 2ème lecture, validées par la Cour Constitutionnelle et même promulguées mais non appliquées par le gouvernement qui en
a la responsabilité.
Je précise au passage que la seule loi de ce registre du partage de compétences qui a connu un début d’application est celle relative à la gestion des sociétés d’état et des
établissements publics mais elle a été violée dans ses dispositions concernant les nominations des Directeurs Généraux et des Directeurs Régionaux, intervenues avant même la mise en place des
Conseils d’administration.
Face à un tel constat de blocage, beaucoup de gens ont tendance à se poser ou à nous poser la question suivante : que fait l’Assemblée dans tout ça ?
Voici ma réponse, elle est en fait une autre question :
Que peut faire l’Assemblée ?
Que peut-elle faire lorsque la constitution lui attribue le seul rôle de voter les lois ? Elle vote les lois, elle en a votées
en quantité industrielle.
Malgré les mauvaises conditions de vie et de travail qui leur sont imposées par le gouvernement, les députés se sont toujours acquittés de leur mission de législateurs en
toute conscience et dans le respect des intérêts du peuple et de la Nation , consentant ainsi à d’importants sacrifices.
Mais que peuvent-ils faire d’autre, face à un gouvernement qui n’est pas tenu de faire une déclaration de politique générale, qui n’est pas obligé de dire ce qu’il fait ni de
rendre compte comment il le fait et de surcroît un gouvernement qui ne représente pas la majorité parlementaire, qui peut ne pas compter même un seul député à l’Assemblée ; en somme un
gouvernement qui jouit de l’irresponsabilité constitutionnelle.
Ceci dit je suis tenté de poser à mon tour la question suivante :
Que peut faire le peuple souverain devant un Président qui ne peut plus se représenter aux électeurs échappant ainsi à la sanction populaire du suffrage universel ?
La réponse est qu’il ne peut pas grand-chose, tout comme ses représentants élus ont du mal à se faire entendre.
Pourtant comme je viens de le rappeler, l’Assemblée ne cesse de s’exprimer, de faire des propositions et des recommandations, et d’offrir sa collaboration sur tous les sujets
d’intérêt national et sur des questions intéressant la vie des citoyens.
Qu’il s’agisse de l’occupation de l’île comorienne de Mayotte, du problème du séparatisme dans l’île d’Anjouan, de la cherté de la vie etc…. des sujets qui ont fait l’objet
de résolutions votées à l’Assemblée et transmises au gouvernement et qui sont restées lettre morte alors que les problèmes soulevés demeurent la chasse jalousement gardée d’une minorité clanique
qui agit dans une totale opacité.
Même les dossiers d’investissements qualifiés de prioritaires par le gouvernement connaissent la même opacité.
A titre d’exemple, l’année 2007 baptisée par le gouvernement année de l’habitat est sur le point de finir, alors que l’Assemblée ne dispose d’aucune information concernant le
projet habitat, dit projet phare du Président ; ni ses objectifs, ni son financement, ni son évolution ; rien.
Ceci est valable pour presque tous les dossiers et même ceux qui ont obtenu l’autorisation de signature de l’Assemblée ne sont pas traités avec la transparence
requise.
Nous n’allons pas continuer cette description obscure de l’Etat de notre nation, même si la tentation est forte étant donné la gravité de la situation qui prévaut dans le
pays et qui suscite en nous beaucoup d’inquiétudes.
Nous allons directement déduire que notre pays est confronté à un grave problème de mauvaise gouvernance.
Or nous sommes convaincu que seule une bonne gouvernance pourrait nous permettre de gérer de façon apaisée et efficiente le nouveau cadre institutionnel complexe, issu de la
constitution de 2001, et gage de la réconciliation nationale comorienne.
Nous pensons que ce pays a besoin d’une bonne gouvernance qui commencerait par l’application sans restriction de la Constitution et des lois, une gouvernance qui créerait les
conditions permettant à toutes les institutions de fonctionner correctement et de jouer pleinement et sereinement chacune leur rôle, une gouvernance qui empêcherait les exécutifs de l’Union et
des îles de rechercher des arrangements au détriment de la loi, et qui obligerait les gouvernements de l’Union et des îles à faire preuve de rigueur et de transparence dans la gestion de la chose
publique.
C’est enfin la bonne gouvernance qui permettrait au Président de l’Union de veiller à ce que toutes les institutions de l’Union concourent aux objectifs nationaux de paix, de
stabilité, de concorde civile et oeuvrent ensemble au recouvrement de l’intégrité territoriale du pays, au respect de la démocratie et de l’Etat de droit.
Honorable Assistance, Mesdames et Messieurs
Comme nous l’avions prévu, la session que nous entamons aujourd’hui risque d’être déterminante pour l’avenir proche des
institutions de ce pays car les députés se sont promis d’inaugurer un nouveau type de relation entre l’Assemblée et le Gouvernement.
Cette relation, si elle doit exister, devra être faite de respect réciproque de compréhension mutuelle et de franche
collaboration ou elle n’existera pas.
La priorité des députés dans cette session n’est plus le vote des lois. D’ailleurs Cela ne semble pas être celle du gouvernement
non plus puisqu’ aucun nouveau projet n’est parvenu à l’Assemblée à l’occasion de l’actuelle session ordinaire.
Certes de part la Constitution le champ d’action de l’Assemblée est limité et son rôle réduit, comme je l’ai évoqué à
l’instant.
Il est vrai qu’elle est confrontée à des difficultés permanentes liées à ses relations difficiles avec tous les départements et
services placés sous l’autorité du gouvernement tels que la Fonction Publique où ses mesures concernant la gestion de son personnel sont pratiquement ignorées, le Trésor Public où elle ne
bénéficie d’aucun plan de décaissement, ses priorités étant toujours reléguées de manière unilatérale et parfois humiliante derrière les besoins toujours croissants et tous primordiaux du
gouvernement qui se confond avec l’Etat, ignorant les droits des autres institutions de l’Union.
Il en est de même pour le service logement qui méconnaît l’existence de notre institution et les Affaires Etrangères qui a exclu
les députés et les hauts responsables de l’Assemblée de la liste des ayants droit au passeport diplomatique et qui les soumet à rude épreuve avant de leur octroyer éventuellement un passeport de
service ; tout ceci par voie d’autorité, sans aucune explication.
Malgré toutes ces difficultés, et ce n’est là que quelques exemples, notre préoccupation majeure à l’occasion de cette session est
de trouver les voies et moyens de faire jouer à l’Assemblée un rôle plus important sur l’échiquier institutionnel national.
Lorsque de plus en plus de voix se lèvent pour dénoncer des irrégularités à la Cour Constitutionnelle et remettre en cause sa
crédibilité ; et quand le Président de la République qui avait annoncé il y a quelque temps qu’il était mal servi et parfois trahi, persiste dans son amertume en annonçant qu’il se sent seul
dans l’exercice des ses fonctions et va même jusqu’à parler de l’éventualité d’une démission dans un discours prononcé en public, et que peu de temps après, le Président de l’île Autonome
de Ngazidja qu’on dit proche du Président SAMI et de son régime est reçu à grande pompe par les autorités autoproclamées d’Anjouan nous pensons que l’Assemblée doit se constituer en vigie et
assumer plus de responsabilité pour pallier les incertitudes et autres interrogations sur l’avenir proche du pays.
Elle doit pouvoir creuser pour trouver un cadre approprié où les échanges permettront de donner des réponses concrètes aux
questions pertinentes qui se posent et où les réponses pourront se transformer en actes positifs.
Dieu sait si les sujets de préoccupation sont nombreux et se situent à divers niveaux.
L’Assemblée va devoir se préoccuper plus sérieusement de son autonomie administrative et financière conformément à la loi et aux
traditions parlementaires, à la cotisation des députés à la Caisse de retraite, mais aussi et surtout des questions nationales plus importantes de l’occupation de l’île comorienne de Mayotte, du
séparatisme dans l’île d’Anjouan, de l’application des lois votées et promulguées, des dossiers d’investissements, de la frénésie des missions gouvernementales effectuées à l’Extérieur
etc...
D’autres sujets de non moindre importance concernant à la fois la gouvernance et la démocratie dans notre pays, méritent aussi
qu’on s’y attarde.
Ce sont entre autres ;
- le rôle des médias publics dans le plurisme politique ;
- la place des médias privés dans le débat politique ;
- la place et le rôle des partis politiques dans la vie publique nationale.
Le respect de l’état de droit voudrait aussi que le parlement puisse demander des explications sur le cas d’un citoyen et de surcroît un responsable politique et ancien
haut dirigeant de notre pays emprisonné depuis plusieurs mois sans jugement ; n’est-ce pas là également un sérieux sujet de préoccupation où l’arbitraire semble l’emporter sur la présomption
d’innocence pourtant garantie par le droit comorien, la déclaration universelle des droits de l’homme et des conventions internationales dont notre pays est signataire ?
L’actualité aussi nous impose ses propres éléments qui ont tous leur place dans nos réflexions et nos échanges ;
Je pense à l’interdiction faite par les autorités de fait d’Anjouan au vice-président de l’Assemblée le député Mohamed Djaanfari de prendre l’avion à Anjouan pour venir à
Moroni participer à cette séance d’ouverture de la session, ce qui l’a obligé à se déplacer par un Kwassa-Kwassa jusqu’à Mwali avant de nous rejoindre ici.
Je veux parler aussi de la situation compliquée des étudiants comoriens de Madagascar et même de la rumeur de plus en plus répandue selon laquelle aux derniers jeux des îles
de l’Océan Indien, la sélection comorienne de football aurait négocié sa de faite lors du match contre l’équipe malgache.
Honorable Assistance, Mesdames et Messieurs,
Voila brièvement annoncé l’essentiel du menu de cette session ordinaire d’octobre et l’esprit dans lequel nous comptons l’aborder.
Je pense que nous pouvons cette fois compter sur la collaboration franche du gouvernement pour l’intérêt supérieur de la Nation.
Nous en appelons surtout au Président de l’Union qui selon l’article 12 de la Constitution que je cite : « est le symbole
de l’Unité Nationale, le garant de l’intangibilité des frontières telles qu’internationalement reconnues ainsi que de la souveraineté de l’Union, l’arbitre et le modérateur du fonctionnement
régulier des institutions fin de citation » pour qu’il appuie nos initiatives et encourage concrètement nos démarches qui n’ont d’autre but que d’éviter le pire à notre pays et de l’amener à
fonctionner comme un pays normal où les dirigeants se respectent, respectent le peuple et les institutions et se conforment à la Constitution , aux lois et aux engagements
internationaux.
C’est sur ce que je déclare ouverte la session parlementaire ordinaire d’octobre 2007 et je vous remercie de votre aimable attention.