Agence comorienne de presse (HZK-Presse)
Comores / Economie
Moroni, mercredi 19 novembre 2008 (HZK-Presse) – Rejetée le 24 juillet dernier en séance plénière par 21 députés parmi les 33 élus
constituant l’assemblée de l’Union des Comores, le projet de loi relatif à la « citoyenneté économique » a été de nouveau réintroduit en seconde lecture au parlement, par le
gouvernement de l’Union pour adoption.
Confié à la commission des finances, le texte fera l’objet d’intenses discussions parfois houleuses, au point que les travaux ont été momentanément suspendus pour des « raisons d’ordre technique », croit-on savoir dans les couloir du Palais du peuple. Ibrahim Soefou député à l’Union de surcroît membre du parti CRC de l’ancien président Azali, nous confiera que le gouvernement a été contraint de modifier juste le titre du projet qui prêterait à confusion.
Le projet de loi, au centre d’un débat parlementaire le plus « contradictoire » de cette législature, aurait assimilé deux projets diamétralement opposés : celui relatif au code de la nationalité et du code des investissements. Appelé au secours par le gouvernement pour apporter son expertise, le doyen des juristes de la place en l’occurrence Nordine Abodo a mis la main à la pâte en essayant d’apporter un éclairage nouveau sur le texte au sein de la commission des finances.
L’OPACO (organisation du patronat Comorien) a été reçue par la commission au même titre que les partis politiques de l’opposition pour donner leur avis. Tout de même, les députés de l’île de Ngazidja, des cadres de l’administration centrale, des notables ont été à leur tour sondés pour le même motif et ce, pour apporter leur contribution sur un sujet aussi important que le programme de citoyenneté économique.
Le projet lit-on dans le rapport consiste à « attirer aux Comores des hommes d’affaires ayant de l’expérience pour promouvoir le développement et la construction d’une économie forte et prospère ». Au terme de 12 séances de travail tenues entre le 25 octobre et le 13 novembre dernier, la commission a eu à établir le calendrier des travaux d’examen du projet de loi en apportant des propositions d’amendement aux dispositions du code de la nationalité comorienne.
A la lecture du rapport général, dont La Gazette s’est procurée une copie, la commission se dit « avoir largement et profondément tenu compte des craintes, des peurs, des appréhensions et des doutes ô combien justes et légitimes de notre peuple quant à la naturalisation massive de 4000 familles bidouns dont nous ignorons tout… ». Force est de constater que l’actuel projet de loi a exclu quelques passages controversés qui figuraient dans la version précédente : « il n’est plus question ni de bidouns ni de 100 ou 300 millions de dollars américains à gagner par récompense », comme ce fut le cas dans le 1er projet de loi du gouvernement, qui a été rejeté.
Autant dire que le gouvernement comorien et les députés du moins ceux de la commission des finances se sont mis d’accord pour refuser la possibilité d’acquérir la nationalité comorienne pour cette catégorie de population considérée comme des apatrides installés dans certains pays du Golfe dont le Koweit et les Emirats Arabes Unies. Pourtant, selon nos sources, des décrets ont déjà été signés depuis le 27 juin 2008 par les autorités comoriennes, portant naturalisation de quelques étrangers résidant aux Emirats, leur permettant l’obtention de passeports comoriens actuellement en circulation.
Si le gouvernement comorien exerce une prérogative exclusive, au regard de la constitution en matière de nationalité, il est permis de s’interroger sur l’urgence et la nécessité d’un projet de loi spécifique, alors que dans le domaine économique le code des investissement reste un cadre de référence incontournable dans tous les pays.
Certes, plusieurs pays émergeant ont fait recours à des investissements étrangers. La commission des finances citera le Brésil, les Etats-Unis, le Mexique, l’île Maurice….et bien d’autres pour convaincre les élus à voter en faveur de la loi. Oubliant de citer les instruments utilisés pour la réussite des uns et les conséquences enregistrés par les autres notamment l’effondrement du tissu de l’entreprenariat locale (Zimbabwe, Madagascar, Algérie, Côte d’Ivoire…) de par l’insécurité juridique, l’insuffisance des subventions de l’Etat pour accompagner les entreprises locales ou de l’impossibilité des nationaux à s’associer aux capitaux étrangers attendus.
La commission des finances émettra le vœu de voir l’Etat comorien respecter la loi une fois adoptée et promulguée, en soulignant ceci : « le reste est une question de confiance au gouvernement pour respecter scrupuleusement cette loi » !
Notons au passage que parmi les articles amendés (1er et 2) il a été retenu que « l’acquisition de la citoyenneté économique par décision de l’autorité publique résulte d’une décision accordée à la demande d’une personne majeure ayant la qualité de partenaire économique du gouvernement des Comores ». Ainsi, une Commission Nationale Indépendante sera instituée par décret présidentiel pour statuer sur les demandes de la citoyenneté économique à toute personne qui répond aux articles 2, 3, 4 de la loi.
A fortiori, le projet de loi aurait des chances d’être voté une fois que la conférence des présidents aura accepté les mandements intervenus sur l’intitulé et fixé la date de la plénière, probablement avant la fin du mois. Mais la guerre n’est pas gagnée d’avance. Les autorités des îles en l’occurrence le chef de l’exécutif de Ngazidja et le président de l’Assemblée auraient sollicité être associés.
Hier, une lettre signée par 9 partis d’opposition (dont l’UNDC, RIJA, PEC) est adressée aux députés pour leur demander de voter contre la loi qui, selon les signataires, constituera « un scandale politico-financier sans précèdent » aux Comores, en citant à titre d’exemple l’affaire Aschley… Question d’intimidation ou de méfiance ? En tout cas seuls les élus auront le dernier mot dans quelques jours seulement. (Vous pouvez aussi voir ce que pense Abdou Djabir, le président du parti MSADA et de la COMUNA en cliquant ICI )
A. Nabahane
191108/an/hzkpresse/6h00