Agence comorienne de Presse (HZK-Presse)
Moroni, lundi 15 mars 2010 (HZK-Presse) – « L’activité est débordante », souffle Cheikh Fatoumata, major au service des Urgences du centre hospitalier national El-Maarouf, en parlant de la très grande affluence des malades atteints de fièvre dans cet établissement public. Il est 11 h 00, ce lundi 15 mars. Dans une petite chambre aménagée à l’entrée de la grande salle des Urgences, deux employés assis devant une petite table tiennent le registre de l’hôpital où sont enregistrés les malades qui s’y présentent. Ce sont, en tout, 27 patients qui sont inscrits depuis ce matin. 23 d’entre eux ont de la fièvre.
Sur les bancs entreposés dans cette petite salle, d’autres patients, les uns assis et les autres allongés, attendent. « J’ai une fatigue générale », murmure Chamsoudine, un jeune venu du village de Mandza. A côté, devant le service des consultations externes, c’est une très longue file d’attente composée en grande majorité de femmes qui patientent. En fait, depuis le début de l’année une maladie dont les médecins n’ont pas encore pu identifier la nature sévit dans le pays. Elle aurait connu un premier pic au mois de janvier avant de redescendre et remonter pour atteindre le sommet de ce mois de mars.
Des personnes souffrant d’une fatigue musculaire générale et une température très élevée se dirigent en masse dans les différents établissements sanitaires de l’île pour des soins. Si certains symptômes de cette maladie font penser, en premier lieu au paludisme, après analyse les médecins s’aperçoivent qu’il n’en est rien. Il s’agit d’une autre maladie dont ils cherchent encore à identifier l’origine. « Nous avons effectué 17 prélèvements qui sont envoyés à l’institut Pasteur de Madagascar pour analyse », confie le docteur Moussa Mohamed, directeur national de la santé aue nous avons rencontré dans les allées des Urgences. En attendant, la rue, qui ne manque pas d’inspiration, a déjà trouvé un nom à cette maladie. Elle l’a, ironiquement, dénommée la « tournante » en référence au fait qu’elle attrape les gens, presque, à tour de rôle. Dans le contexte politique actuel, cela peut également paraître comme une manière subtile de se moquer des politiciens…
« Cette fièvre est brutale. Les malades ont une fatigue musculaire générale et des températures très élevées qui atteignent jusqu’à 40°. Ceux qui se présentent, ici, sont hospitalisés pendant 8 heures de temps et puis nous les libérons pour pouvoir recevoir d’autres patients. Nous sommes débordés », explique Cheikh Fatoumata. Certains ont également des vertiges, des vomissements et de la diarrhée. « 90% des patients qui viennent en consultation externe présentent de la fièvre », affirme Issa Aboudou, médecin à El-Maarouf qui, jusqu’à, 11h11, avait enregistré une vingtaine de patients.
« Dans un pays où le paludisme est endémique, une température supérieure ou égale à 37,5 est considéré, en première intention, comme étant un signe du paludisme. Et si après un traitement adéquat la fièvre ne baisse pas, à ce moment il faut penser à autre chose. Il se peut qu’il s’agisse d’une virose qui circule dans le pays. Reste que la sérologie virale ne se fait pas ici », poursuit-il. Pourtant, ce médecin semble être certain d’une chose : « Que ça soit du paludisme ou une virose, cette maladie doit être véhiculée par les moustiques », soutient-il, ajoutant qu’il faut « frapper vite et fort ». Il n’y a pas du temps à perdre.
A la direction du programme national de lutte contre le paludisme (Pnlp) situé à quelques mètres derrière l’hôpital El-Maarouf, l’ambiance est identique. Ici, également, les bancs et les escaliers sont pris d’assauts par des malades, hommes et femmes de tous les âges. A l’intérieur du bâtiment deux femmes s’affairent à effectuer des prélèvements sanguins à tous ces malades. C’est la fameuse goutte épaisse. Le centre offre gratuitement le traitement, du Coartem, à tous ceux dont la goutte épaisse s’avère positive.
« Nous sommes débordés », lance le docteur Affane Bacar, Coordinateur du Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP). « Nous n’avons que deux techniciens de laboratoire. La charge dépasse les normes. Nos agents travaillent jusqu’à tard dans la soirée », se plaint-il ajoutant qu’à partir d’aujourd’hui, ils seront obligés de limiter les prises en charges. Selon ce responsable du Pnlp dont le service vient d’élaborer un tableau comparatif des mois de janvier, février jusqu’au 15 mars de l’année dernière et les mêmes mois cette année, le pourcentage des gouttes épaisses réalisées au centre reste le même. Cependant, cette année, le nombre des patients qui se sont présentés a presque doublé. « Chaque jour, on va jusqu’à 100 patients », chuchote une employée. Un conseil ? « Dès qu’on sent la maladie, il faut prendre du paracétamol pour calmer la douleur. Boire du jus d’orange et beaucoup d’eau. Et ensuite, voir son médecin », recommande le médecin Affane Bacar.
S.A.
150310/sa/hzkpresse/6h00