Moroni, lundi 12 mars 2007
(HZK-Presse) – Le président de
la Cour constitutionnelle,
Abdallah Ahmed Sourette, a été
démis de ses fonctions vendredi.
En réaction à cette décision
qu’il assimile à un « putsch »
fomenté par ses pairs,
l’intéressé a déclaré le
lendemain, lors d’une conférence de
presse tenue à son domicile, son
intention de continuer à
diriger la plus haute
juridiction du pays.
« Jusqu’à preuve
du contraire, je suis le président de la
Cour constitutionnelle, et j’entends le rester », dit-il.
A l’origine de cette fronde interne, la première à éclabousser
la Cour depuis sa mise en place en juin 2004, une
malencontreuse lettre que M. Sourette a adressée en
septembre 2006, au ministre de l’éducation de l’île autonome
d’Anjouan, pour lui donner, à sa demande, « un avis
personnel sur la question litigieuse du baccalauréat session
2006 », organisée dans l’île.
Objet d’une longue
controverse, le déroulement de
l’examen du Bac à Anjouan avait été déclaré « entaché
d’irrégularités » [renvoi d’examinateurs venant de Moroni et
fuites de sujets d’épreuves], amenant les autorités de
l’Union à ne pas valider les résultats, et à exiger un test
d’admissibilité à l’Université pour les bacheliers de l’île.
L’exécutif d’Anjouan était accusé de « violation de l’accord »
confiant au gouvernement de l’Union la supervision de cet
examen national, pour la première fois depuis l’éclatement
de la crise séparatiste en 1997.
Dans sa lettre, le président de la Cour considérait que « nulle
disposition constitutionnelle ne mentionne ni compétence
partagée, ni compétence exclusive à l’Union pour ce qui
concerne le suivi et l’évaluation de l’enseignement
secondaire ».
S’appuyant sur la loi organique relative au partage des
compétences, M. Sourette a même ajouté que ces « deux
prérogatives [revenaient] exclusivement aux îles ».
C’est sans doute la phrase de trop, qui a poussé le président
de la République, Ahmed Abdallah Sambi, à s’adresser
directement à chacun des membres de la Cour (excepté le
président), par voie de correspondance datée du 26 février
dernier, pour leur demander de se réunir afin de statuer sur
l’affaire.
Le chef de l’Etat, affirme agir ainsi en « arbitre et
modérateur du fonctionnement des institutions », contre ce
qu’il considère comme une « violation flagrante des règles
régissant la haute juridiction » écrit-il.
Mais la troisième personnalité de l’Etat, rejette cette
accusation, estimant qu’il n’a pas outrepassé ses
prérogatives. Et M. Sourette de dénoncer « l’illégalité de la
procédure suivie pour sa déposition » ainsi que
l’interdiction
qui lui est faite depuis samedi d’accéder dans ses bureaux.
Le premier conseiller à la Cour, M. Abdoulmadjid Youssouf,
seul membre qui s’est dit « solidaire » au président déchu, a
déclaré à la presse samedi soir que « la Cour
constitutionnelle est une institution indépendante et
souveraine dont les membres sont inamovibles ».
C’est le doyen de la Cour, Mohamed Hassanaly qui a été
désigné pour assurer l’intérim de la présidence. Une
procédure contestée par M. Abdoulmadjid, qui estime que ce
dernier « n’a pas qualité à remplacer le président en cas de
vacance de poste ».
Mais le débat tend à prendre une tournure inattendue, l
orsque le président déchu de la Cour demande que la l
umière soit faite sur le cas de deux de ses collègues
membres de la haute juridiction, qui auraient « bénéficié
depuis leur désignation en 2002 d’indemnités et avantages
liés à leurs fonctions alors que la Cour n’a été
officiellement
installée qu’en 2004 », dit-il.
Rappelons que 24 heures avant sa destitution, Ahmed
Sourette était reçu en audience par le chef de l’Etat, dans
une démarche visant à « privilégier, selon lui, la voie de la
négociation », dans cette affaire qui remonte à plusieurs
mois et dont ce nouveau rebondissement ne manquera pas
d’influer sur les élections présidentielles des îles prévues
en
juin prochain.
Agé de 58 ans et originaire de Domoni (Anjouan), Abdallah
A. Sourette a été désigné membre de la Cour
constitutionnelle par le président de l’île autonome
d’Anjouan, le colonel Mohamed Bacar. Le mandant des sept
juges constitutionnels est de cinq ans.