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  • : HALIDI-BLOG-COMORES, Blog des COMORES
  • : BLOG DES COMORES GERE DEPUIS LE 01 DECEMBRE 2013 PAR MARIAMA HALIDI
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A SAVOIR

QU'EST CE QUE LA LANGUE COMORIENNE ?

Pour répondre à cette question pertinente, nous vous proposons ci- dessous l'interview du grand linguiste et spécialiste de la langue comorienne, Mohamed-Ahmed Chamanga

 

 
INTERVIEW DE CHAMANGA PAR RFO EN 2004
 
 
 Le comorien est une langue composée de mots africains, de mots arabes voire parfois de mots portugais et anglais. D'où vient la langue comorienne ?

M.A.C : Le fonds lexical de la langue comorienne est essentiellement « africain » comme vous le dites, et plus précisément bantu. Les emprunts au portugais ou à l'anglais sont relativement faibles. Par contre, l'apport arabe est très important. Cela s'explique par la très forte islamisation des Comores, depuis la Grande Comore(Ngazidja) jusqu'à Mayotte (Maore) en passant par Mohéli (Mwali)et Anjouan (Ndzuwani). Malgré ces emprunts, le comorien (shikomor) reste, sur le plan de sa structure grammaticale, une langue bantu.

Qu'appelle t-on une langue bantu ?

M.A.C : Le bantu est une famille de langues, la plus importante d'Afrique. Les langues qui composent cette famille couvrent pratiquement toute la partie australe du continent noir.

Y a t-il encore aujourd'hui en Afrique ou à Madagascar des populations qui parlent une langue similaire au comorien ?

M.A.C : Bien sûr ! On trouve par exemple le swahili en Tanzanie, le lingala au Congo Démocratique, le kikongo au Congo, le zulu en Afrique du Sud, le shona au Zimbabwe-Mozambique, le tswana au Botswana, le kinyarwanda-kirundi au Rwanda-Burundi, etc. Comme ces langues appartiennent à la même famille, elles ont forcément beaucoup de points communs dans la structure des mots, leurs répartitions dans les phrases, les accords grammaticaux, etc. Elles ont aussi un minimum de vocabulaire commun.
Prenons par exemple le mot bantu ! Ce mot est attesté dans certaines langues, comme le lingala, et il signifie « hommes ». C'est le pluriel du mot muntu qui veut dire « homme » au singulier. Dans d'autres langues, ces mots se déclinent au pluriel en watu (swahili), wantru ou watru ou en encore wandru (shikomor) ; au singulier, nous avons respectivement mtu, muntru, mtru, mndru.
Prenons encore l'exemple de la phrase kinyarwanda suivante qui signifie : « Combien d'hommes ? » : Abantu bangahe ? Nous avons en comorien les équivalences suivantes :Wantru wangapvi ?Watru wangapvi ?Wandru wanga(pvi) ? et en swahili :watu wangapi ?

Ne pensez-vous pas qu'il y a beaucoup de ressemblance dans tout ça ?

M.A.C : A Madagascar, jusqu'au milieu du XXe siècle, il y avait quelques poches bantuphones sur la côte nord-ouest. Mais les langues africaines qui y étaient parlées, le swahili à Marodoka ou le makua à Maintirano, ont aujourd'hui disparu. Le malgache appartient à une autre famille de langues : les langues austronésiennes comme par exemple les langues indonésiennes.

Le comorien est souvent comparé au swahili, parfois on a même dit que le comorien en était dérivé ?

M.A.C: Selon les résultats des recherches des trois dernières décennies, il est prouvé que le comorien et le swahili sont génétiquement issus d'une même souche-mère, d'où leur très grande parenté. Mais les deux langues se seraient séparées aux environs du XIIème siècle. On peut donc dire que ce sont deux langues soeurs. Si la confusion a pu se maintenir jusqu'à une période pas très lointaine, c'était à cause de la très grande proximité des deux langues, mais aussi parce que les sultans des Comores parlaient swahili et beaucoup de correspondances et traités avec les pays voisins ou les puissances étrangères étaient rédigés en swahili qui étaient à l'époque la plus importante langue de communication et du commerce de cette région de l'océan indien occidental.
Par combien de personnes est parlée la langue comorienne?
M.A.C:On peut estimer que la langue comorienne est parlée aujourd'hui par un million de personnes environ : les 750 000 habitants de l'archipel des Comores plus la très importante diaspora comorienne, que l'on peut retrouver notamment à Madagascar, à Zanzibar ou encore en France.

Est-elle enseignée à l'école ? Si non pourquoi ?

M.A.C: Malheureusement, elle ne l'est pas. Pourquoi ? Parce que : Premièrement, la colonisation française, avec sa mission « civilisatrice », n'avait jamais reconnu au peuple dominé une quelconque culture ou civilisation et que les langues des dominées n'étaient pas des langues mais, avec un sens très péjoratif, des dialectes qui n'avaient ni vocabulaire développé ni grammaire.
Deuxièmement, le pouvoir très centralisateur de l'Etat français avait imposé le français comme la seule langue de l'administration partout. Cela était vrai dans les colonies, mais aussi en métropole. C'est ainsi qu'on a banni l'enseignement du breton en Bretagne, du basque au Pays Basque (Sud-Ouest de la France).
Troisièmement enfin, nous avons nous-mêmes fini par admettre que notre langue est pauvre et sans grammaire. Elle ne peut donc pas être enseigné. Il faut encore souligner qu'avec l'instabilité chronique des Comores indépendantes, aucune réflexion sérieuse n'a pu être menée sur la question. Pourtant, les pédagogues sont unanimes : pour permettre l'épanouissement des enfants, il est nécessaire que ces derniers puissent s'exprimer pleinement dans leur langue maternelle...

Y a t-il une ou des langues comoriennes ?

M.A.C:Nous avons la chance d'avoir une seule langue comorienne, depuis Ngazidja jusqu'à Maore. Mais comme toute langue, le comorien se décline en plusieurs dialectes qui en sont les variantes régionales : le shingazidja à la Grande Comore, le shimwali à Mohéli, le shindzuani à Anjouan et le shimaore à Mayotte.

Comment expliquer l'apparition de divers dialectes sur un territoire aussi exiguë que les Comores ?

M.A.C : Ce phénomène n'est pas spécifique au comorien. Toute langue est formée de plusieurs dialectes. La dialectalisation s'accentue lorsqu'il y a peu de communications et d'échanges entre les régions. A l'inverse, le déplacement d'une population qui parle un dialecte donné vers une autre région où l'on parle un autre dialecte peut également entraîner des changements dans les deux dialectes. Pour le cas des Comores, le facteur du peuplement par vagues successives au cours de l'histoire explique aussi le phénomène.
Les différences dialectales peuvent aussi s'observer à l'intérieur de chaque île. C'est ainsi, par exemple en Grande Comore, que la manière de parler des gens de Mbéni dans la région du Hamahamet diffère du parler des gens de Fumbuni dans la région du Mbadjini. Il en est de même à Anjouan entre les gens de Mutsamudu, sur la côte nord, et ceux du Nyumakele, dans le sud-est de l'île, ou encore, à Mayotte, entre Mamoudzou et Kani Bé ou Mwana-Trindri dans le sud, etc.

Un mot sur la langue mahoraise.

M.A.C:Le shimaore appartient au même sous-groupe dialectal que le shindzuani. C'est dire qu'il faut souvent écouter attentivement pour percevoir les différences entre ces deux dialectes. Le shimaore fait ainsi partie intégrante de la langue comorienne.

Le comorien s'enrichit-il ou s'appauvrit-il (avec le phénomène de créolisation de la langue) ?

M.A.C : Parler à l'heure actuelle de créolisation de la langue comorienne est quelque peu exagéré. Certes elle ingurgite aujourd'hui beaucoup de mots d'origine française. Mais cela reste « raisonnable ». Le comorien a emprunté énormément de vocabulaire d'origine arabe, environ entre 30 et 40 % du lexique, pourtant on ne parle pas de créole arabe, et cela à juste titre. En effet, ce qui fonde une langue, ce ne sont pas seulement les mots. Ce sont surtout sa structure grammaticale et sa syntaxe. De ce point de vue, le comorien ne ressemble ni à l'arabe ni au français.
On ne peut pas dire que le comorien s'appauvrit. Essentiellement oral, il répond parfaitement à nos besoins de communication. Il est toutefois évident qu'une langue écrite possède un stock lexical beaucoup plus étendu qu'une langue orale. Ne vous inquiétez pas pour le comorien. Si un jour, on décide de l'écrire, de l'enseigner et de l'utiliser dans l'administration, il ne pourra que s'enrichir. Il s'enrichira en se forgeant des mots nouveaux ou en empruntant d'autres ailleurs, comme cela se fait dans les langues dites de « grande civilisation ».

Où en est actuellement la recherche sur la langue comorienne ?

M.A.C: La recherche sur la langue comorienne avance ; trop lentement peut-être, mais elle avance. Nous avons aujourd'hui une meilleure connaissance sur elle qu'il y a vingt ans. Malheureusement, c'est un domaine qui intéresse peu de monde, aussi bien chez les nationaux que chez les chercheurs étrangers.

Pensez-vous qu'un jour tous les Comoriens parleront la même langue ? Et sur quoi se fonderait cette sédimentation en une seule langue « nationale » ?

Mohamed Ahmed-Chamanga : Nous parlons déjà la même langue. Ce qui nous manque, c'est une langue standard, comme en Tanzanie avec le swahili, à Madagascar avec le malgache, ou en encore au Zimbabwe avec le shona, etc. Pour arriver à ce stade, il faut qu'il y ait une réelle volonté politique, une prise de conscience chez les Comoriens de vouloir mieux apprivoiser leur propre culture et que soit mise en place une équipe de chercheurs qui se pencherait sur la question et qui proposerait cette langue standard qui serait utilisée dans tout l'archipel des Comores.

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Halidi Mariama (HALIDI-BLOG-COMORES)

 

 

 

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CI-DESSOUS LES NEWS  RECENTES  DES COMORES

 

 

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A PROPOS DE OUANI

Ouani et ses grands hommes
 
 
L’être humain est insignifiant puisque le corbeau et beaucoup d’autres espèces d’arbres vivent plus longtemps que lui. De ce court séjour dans ce bas monde à la différence d’autres êtres vivants, l’homme peut marquer de son empreinte l’histoire.
A OUANI, ce genre d’homme malgré sa rareté, a existé et continu à exister jusqu’à nos jours. En ouvrant ce nouveau chapitre, quelques dignitaires en collaboration avec le comité de pilotage de la ville ont tenu à rendre hommage beaucoup d’hommes et de femmes qui ont fait du bien à cette ville.
En dehors de tout jugement, ils ont fait de leur mieux pour que Ouani devienne l’une des grandes villes les plus rayonnantes des Comores et Ouani l’est grâce à eux. Elle doit continuer à l’être pour nous et les générations à venir.
A titre posthume, nous tirons la révérence devant Saïd Toiha (Baco Moegné), Saïd Abdou Bacar Nomane, Saïd Abdou Sidi et Saïd Andria Zafi.
 
Le premier pour avoir créé la première école privée de la ville dans l’objectif de ne plus avoir un enfant de six à sept ans non scolarisé, le second qui a été le premier à être ministre et dont les louanges dépassent les frontières de la ville, le troisième a accompagné plusieurs années la jeunesse et le dernier a beaucoup contribué au niveau de l’enseignement primaire par son dévouement et son engagement à instruire ceux qui l’ont fait pour nous. Cette liste vient de s’ouvrir et n’est pas prête de se fermer ; beaucoup d’autres personnes disparues ou vivant tels que les enseignants apparaîtront à la prochaine édition.
Ansaly Soiffa Abdourrahamane
 
Article paru en 2003 dans le n° 0 de Jouwa, bulletin d’information de OUANI
 
 
 
 
LES ENFANTS DE LA VILLE DE OUANI
ET L’HISTOIRE   DES COMORES
 
 Beaucoup d’enfants de la ville de OUANI ont marqué et marqueront toujours l’histoire de leur pays : les îles Comores.
 
 En voici quelques uns dans différents domaines.
 La liste n’est pas exhaustive
 
 I) LITTERATURE
 
LITTERATURE ORALE
 
ABDEREMANE ABDALLAH dit BAHA PALA
 
Grand connaisseur du passé comorien décédé brusquement en 1988.
Actuellement, un projet de publication de sa biographie est en étude.
On trouve beaucoup de ses témoignages sur l’histoire des Comores dans le tome 2 de l’excellente thèse de SIDI Ainouddine sur la crise foncière à Anjouan soutenue à l’INALCO en 1994 
 
LITTERATURE ECRITE
 
Mohamed Ahmed-CHAMANGA
 
Grand linguiste des Comores
 
 Né à Ouani (Anjouan) en 1952, Mohamed Ahmed-Chamanga, diplômé de swahili et d'arabe, a fait des recherches linguistiques sur sa langue maternelle. Il enseigne la langue et la littérature comorienne à l'Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco). Il est l'auteur d'une thèse, de plusieurs articles, ainsi que d'un recueil de contes de l'île d'Anjouan : Roi, femmes et djinns (CLIF, 1998). Président de l'Association Fraternité Anjouanaise, Mohamed Ahmed-Chamanga a fondé, en 1997, le journal Masiwa.
 Il enseigne actuellement la langue et la littérature comoriennes à l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales de Paris (INALCO).
 
AINOUDINE SIDI
 
 Historien & grand spécialiste de l’histoire foncière des Comores 
 
 Né à OUANI, en 1956. Il a fait des études d’histoire à l’université de DAKAR (SENEGAL) et a préparé un doctorat d’études africaines à l’INALCO (PARIS)  Il est actuellement chercheur et Directeur du CNDRS (Centre National de Documentation et de Recherches Scientifiques) à MORONI.
 
 II) MUSIQUES & CHANTS
 
DHOIFFIR ABDEREMANE
 
Un des fondateurs de l’orchestre JOUJOU des Comores.
Avec ses chansons axées sur la contestation sociale. Il fait partie des premiers artistes qui ont introduit aux années 60 une nouvelle forme de musique aux COMORES.
 
C’est un homme très discret mais plein de talents. On se souviendra toujours de ses productions à la salle AL CAMAR de MORONI.
 
FOUDHOYLA CHAFFI
 
 Une des premières femmes comoriennes à avoir fait partie d’un orchestre musical.
 Il s’agit là d’un engagement incontestable de la part d’une femme comorienne.
 Elle a commencé à jouer un rôle important dans la chanson à partir de 1975 comme chanteuse principale de l’orchestre JOUJOU des Comores.
Sa voix d’or résonne toujours dans le cœur de tous ceux qui ont vécu dans notre pays de 1975 à 1978. On ne passait pas en effet, une seule journée sans entendre une de ses chansons sur l’égalité des sexes, l’unité des Comores, le changement des mentalités… à la radio nationale.
 
 III) POLITIQUE
 
Le sultan ABDALLAH III
 
 De mère ouanienne, il est l’un des grands sultans qui ont régné dans l’archipel des Comores au 18eme siècle et plus précisément sur l’île d’Anjouan.
 
SITTOU RAGHADAT MOHAMED
 
La première femme ministre et élue député des COMORES
 
Né le 06 juillet 1952 à OUANI. Elle a enseigné pendant plusieurs années le français et l’histoire géographie dans différents collèges du pays avant d’être nommée secrétaire d’Etat à la condition féminine et à la population en 1991.
De 1991 à 1996 elle a assumé de hautes responsabilités politiques : Haut commissaire à la condition féminine, Ministres des affaires sociales, conseiller spécial du président de la république, secrétaire général adjoint du gouvernement, élue députée ….
Actuellement, elle est enseignante à l’IFERE et Présidente du FAWECOM.
 
Article publié sur le site de l'AOFFRAC (www.aoffrac.com)
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 

 

31 mars 2009 2 31 /03 /mars /2009 23:56

Chers visiteurs du blog

 

Nous vous proposons  ci-dessous les notes de lecture du jeune (par l’âge) et grand (par le talent) écrivain-poète comorien Adjmael Halidi consacrées à notre recueil de poèmes « Cris d’ici et d’ailleurs ». Cet article est paru dans Ya  Mkobe, la revue scientifique du CNDRS (Centre National de documentation et de recherche scientifique des Comores) dont nous remercions le directeur de publication de nous avoir autorisé à le diffuser sur notre blog pour vous.

 

Adjmael Halidi (photo), né le 12 juin 1986 à Tsembehou sur l’île d’Anjouan aux Comores,  est l’auteur de plusieurs poèmes publiés sur internet et d’un recueil de nouvelles « Au rythme des alizés » publié aux éditions de la lune en 2006.

 

Un grand poète lunaire qui parle et commente le recueil d'un autre poète lunaire mais novice avec des mots aussi profonds ! sans commentaires. 

 

Bonne lecture.

 

Halidi Allaoui (HALIDI-BLOG-COMORES)

 

 



Confession intime, confession universelle

 

Notes de lecture sur le recueil de poèmes « Cris d’ici et d’ailleurs » de Halidi Allaoui. Moroni : Komédit, 2008, 72 p.

Par Adjmael Halidi

Auteur du recueil de nouvelles

 « Au rythme des alizés »2006 les éditions de la lune

 

 Entre la Mélancolie et la Prière, une petite voix s'élève et nous fait vivre, tel un rêve éveillé, ce laps de temps qui sépare et résume toute la vie de l'Homme. Cet Homme qui né de l'angoisse, de la mélancolie, et qui survit de prières, d'espoir. Le poète, ici, espère se confesser ; pense exprimer sa tristesse, son ras le bol, et, sa confiance à la vie à voix basse. Ironie du sort ! Il se trahit lui-même. Quand il intitule son recueil Cris d'ici et d'ailleurs, le poète Halidi Allaoui met tout le monde dans la confidence ; ses cris diaprés, puisque trempés dans l'encre de toutes les vies de ce monde, du nord au sud, de l'est à l'ouest, ont pris le large, quitté le jeune gosier du poète malgré lui, rien que pour consoler l'autre , l'alter ego, histoire de lui permettre d'y croire car il n'est pas le seul à vivre pareil cas : Cris d'ici et d'ailleurs révèle un secret sans âge : la vie est un étendard qui porte toutes les couleurs , hormis la rose ; mais elle mérite tout de même d'être vécue .

 

 Au travers du premier vers de ce premier recueil riche en poésie et philosophie résonne d'ores et déjà l'esprit, le thème majeur , de l'œuvre poétique de Halidi Allaoui : la Nostalgie : cette frustration que donne l'absence de la chose aimée , ou tout simplement l'angoisse de vivre les souvenirs du royaume d'enfance loin du pays natal ,en somme , comme l'affirme le poète lui-même , la nostalgie est « Une douleur aiguë /Qui imite le vent /(et) déchire (le) cœur » ; surtout quand ce pays « essence » est pris d'assaut par « des preneurs d'otages » . « Je scrute la lune des îles » dit-il. Scruter, pour le jeune poète, ce n'est point le simple fait de chercher à savoir de quels maux souffre son archipel de sultans batailleurs ; même s'il s'écrie « l'ignorance ronge l'esprit », à chaque moment où il manque d'informations sur la situation politique et sociale de ses îles. Scruter, pour ce jeune exilé, c'est un devoir, un dur labeur qui consiste à trouver une solution adéquate aux problèmes centenaires des îles de la Lune, pour qu'enfin il puisse fuir cet asile exempté de minarets, de cocotiers, de véranda pour les contes, de boutres ancestraux. Cet asile vécu comme un calvaire, puisque « l'été l'automne l'hiver et le printemps /N'égalent pas (les) kashkazi et kusi » de ses îles, n'en parlons plus de ces matins dont « le soleil n'offre pas de câlins » que tous les jours il doit supporter à l'étranger. En effet, le poète vit à Rouen, en France. Mais là-bas, même si à plusieurs kilomètres de son pays d'origine, rien n'arrive à l'empêcher de toujours porter ses origines dans son cœur, comme auparavant, telle une mère, ce même pays lui a « intimement abrité dans (son) corps ». « Au large de cet océan houleux / Rien ne saura nous délier », promet-il. Surtout, c'est pendant les crépuscules, à chaque lever de la lune, emblème incontesté de l'Union des Comores, après une longue attente du « vent du soir », au moment où « (son) océan chante » que ses souvenirs ô combien !meilleurs se réveillent de leur triste tombeau, qui n'est autre que le cœur du jeune Halidi, « Point de tombeaux que nos cœurs ». Bien évidemment, le poète, ici, est « un aveugle qui voit », car même si martyr de l'espace et du temps, aveuglé par l'écart, la distance, les kilomètres qui le séparent de son vrai pays, il arrive toujours à voir, à fouiller, à scruter « la lune des îles ». Cette lune que pour nous est à tout le monde, mais que pour le poète n'appartient qu'aux originaires des îles de la Lune. Et qu'à chaque fois qu'il y aura cette lune tout en haut dans le ciel, le regard du Comorien partout où il sera rivé vers ses îles. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle cette lune a toutes les raisons de rappeler au poète son archipel aux mille et une légendes. Ce qui veut dire que même si l'errance de Halidi ne prend pas toujours fin, Ouani, Moroni, Saint-Denis, Rouen... le gîte du poète sera toujours Ouani, sera toujours les îles d'Al Kamar. Rouen n'est qu'une ville adoptive pour notre poète de l'ombre, comme il se qualifie lui-même. Bien sûr qu' Halidi espère n'être qu'un simple visiteur dans Rouen. Cette cité perçue par Halidi Allaoui comme une marâtre, puisqu'en dépit du bonheur qu'elle procure, elle ne peut remplacer la mère biologique, qu'elle soit pauvre ou riche. Pour le poète, Rouen le retient et le sépare de ses îles, donc Rouen est torturante. « Hélas ! Rouen torture ses visiteurs », explique le poète. Autrement dit, le poète prie avec ferveur, surtout dans le poème Destin où il implore tous les dieux de cette terre, d'Allah (Mungu) au dieu des poètes Orphée, par le truchement de Prévert qui l'incarne selon poète, à Mahomet (Mtrume), pour qu'enfin son exil prenne fin ; que le bonheur qu'il est parti chercher à Rouen atteigne aussi les Comores ; que son vrai pays devienne vivable et que ses enfants ne le fuient plus. Lisez le poète à travers ces vers pleins d'anaphores et d'espoir et vous comprendrez :

 

« Peut-être nous aurons pitié de toi
Peut-être nous exploiterons tes moyens
Peut-être nous deviendrons tes citoyens
Peut-être nous ne serons plus des oies »

 

Vivre, un vrai parcours du combattant

 

La question fondamentale de ce recueil, et il ne faut jamais oublier de le souligner qu'elle est existentielle, même si le décor, telle une scène de théâtre, est surréaliste, reste toujours : comment vivre ? En effet, même si le poète croule dans la souffrance, même si les jours du poète sont sombres, des mots comme « minuit », « nuits », « obscurité morose », « aveugle », « soir » démontrent cette obscurité du quotidien du poète , même si le poète « a encore la mort dans l'âme » , et, même s'il a parfois « ras le bol» , il garde toujours espoir . Quand il confie « Las de ce monde, je voulais mourir en silence », il nous rassure qu'il va bien, et, que la feuille blanche adoucit sa peine, lui sert d'antidépresseur. Tout en silence, le poète écrit tout ce qui lui passe par la tête. Ce qui veut dire que même si le bonheur est loin, il y croit toujours :

 

« Nuits d'insomnie incessantes
Attente infructueuse avec d'autres
Tout son espoir reposant sur l'éternité »

 

D'ailleurs, dès le tout début du recueil, Halidi l'a crié haut et fort : « Que puis-je faire d'autre ? /Espérer, espérer... »

 

En effet, le poète Halidi, ne saurait mener ce combat tout seul. Il aurait failli à sa mission. La mission de persévérer, de survivre. Des gens qu'il a connus à 20 ans le soutient. La plupart d'entre eux sont des lémures : Prévert, Bachelard, Molière, Rimbaud, Fanon, Soyinka, Labou Tansi, Abou. Ces derniers, de par leur vécu, l'aident à assumer sa « comorianité » : le fait d'être né français du bout du monde (Comores postcoloniales), de devenir Comorien (Comores indépendantes) et de devenir français métropolitain (le poète a la nationalité française et vit en France). Difficile de se révolter contre la Franç'Afrique (poème L'Humanité, p.49) quand on a comme ancêtres les gaulois. Discrètement, il se révolte contre la puissance mère : il parle d'Anjouan et de Mohéli de 1997. Du séparatisme et du rattachement à la France.

 

« Les feuilles malgré elles
Ont choisi de se faire écraser
A sa droite il n'y a qu'une porte blanche
Au-dessus de sa tête
Se trouve un plafond tricolore
Qui baise un tissu vert »

 

La femme, un être omniprésent

 

Le thème de la femme est omniprésent dans Cris d'ici et d'ailleurs .D'ailleurs, si on veuille bien croire au poète Halidi, la femme est sa muse, « femme de mes idées ». Elle est aussi la personne qui le pousse à ne pas baisser les bras, « femme d'espoir ». La femme est tout pour le poète. Mais de quelle femme l'auteur parle ici ? Sûrement cette « Rose du bonheur », cette « Maman », cette « femme verset » n'est autre que ses îles. «Elle »la bien-aimée c'est certainement son pays, les Comores. Ce pays qui le manque à mourir. Enfin, Halidi Allaoui, à travers ce tout premier recueil de poèmes ,sorti chez Komédit (première maison d'édition comorienne) , prie et espère que son pays sera un jour épargné de ses tyrans, de ses mauvais enfants, de ses agitateurs qui font à ce que la population comorienne ait des « espoirs laminés ».

 

                                                                                  Adjmaël Halidi

                                                                                      www.adjmael-halidi.com

 

Source : la revue Ya Mkobe n° 16-17 / 2008


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