Agence comorienne de presse (HZK-Presse)
Comores / Politique & institutions
Moroni, vendredi 30 janvier 2009 (HZK-Presse) – Le ministre de la justice en charge des relations avec le parlement et les institutions des îles, M. Mmadi Ali tient à rappeler que son parti le FNJ, ainsi que d’autres tels que Chuma et Pasoco s’étaient déjà opposés à l’actuelle constitution lors du référendum du 23 décembre 2001, prédisant les difficultés de son application. S’exprimant en qualité de dirigeant du FNJ, il estime que les arguments avancés à l’époque devaient convaincre.
« L’architecture institutionnelle en elle-même est budgétivore, rien que pour sa mise en place. La constitution renforce aussi l’esprit séparatiste en permettant la coexistence dans un même pays de quatre constitutions, quatre gouvernements, quatre parlements, autant de drapeaux et d’hymnes… », martèle-t-il.
Selon lui, maintenir ce type d’organisation de l’Etat « c’est légitimer le sentiment d’insularité au lieu de renforcer le patriotisme et l’idée d’appartenir à une nation pour partager un destin commun entre nos îles ». Rappelant les faits, depuis les pourparlers inter-comoriens de Fomboni sur la résolution de la crise séparatiste anjouanaise, M. Mmadi Ali garde encore en mémoire les trois commissions chargées chacune séparément de missions précises. Or à ses yeux seule la commission chargée de la réconciliation nationale a donné des résultats à travers l’accord cadre du 17 février 2001 [qui a créé le nouvel ensemble comorien doté d’une très large autonomie des îles, ndlr].
Par contre à la place de la commission chargée de rédiger un projet de constitution, des experts étrangers et nationaux y compris Mohamed Abdouloihabi [actuel chef de l’exécutif de l’île de Ngazidja], mandaté à l’époque par la coalition de l’opposition contre Azali, ont rédigé l’actuelle constitution. Pour le ministre, « ce n’est pas réellement le fruit escompté mais l’opposition défendait l’argument selon lequel en votant favorablement, Azali allait quitter le pouvoir aussi vite qu’il avait pris par la force un certain 30 avril 1999 ».
Dans l’objectif de rectifier les imperfections, le ministre dira que l’initiative du président vise surtout à harmoniser les élections, et à s’attaquer au caractère budgétivore de nos institutions actuelles. Interrogé sur la concomitance du référendum constitutionnel avec la consultation sur la « départementalisation » de Mayotte, au même mois de mars prochain, le ministre estime qu’il n’y a aucun risque de confusion dans l’opinion. « En tenant un tel scrutin sur cette île reconnue par le droit international comme faisant partie de l’Etat comorien, la France sait qu’elle viole ce droit et les résolutions des Nations Unies », soutient le ministre de la justice.
Estimant que la riposte du gouvernement de l’Union des Comores est entreprise eu égard aux discours du président Sambi dans le concert des Nations, le ministre rasure que la question de Mayotte sera introduite à l’ordre du jour de l’AG des Nations Unies. Et Mmadi Ali d’ajouter que « toute nouvelle élection à Mayotte est nulle et non avenue ».
Quant à la question de la prorogation d’une année du mandat de l’actuel chef de l’Etat, le ministre de la justice ne voit pas d’inconvénient car « la proposition consiste à harmoniser les élections » pour en réduire la fréquence jugée trop rapprochée.
A en croire un juriste constitutionnaliste qui a requit l’anonymat, l’initiative du président de l’Union d’organiser un référendum « viole la constitution » au regard de la loi fondamentale dans son chapitre titre IV de la compétence de la Cour Constitutionnelle (article 31) qui s’appuie en même temps sur la loi électorale en vigueur, donnant des compétences aux juges constitutionnels en matière de contentieux électoral, y compris le référendum.
C’est ainsi que cet homme de loi se fonde sur lesdites prérogatives de la haute juridiction, dont le chapitre VI intitulé « De la révision de la constitution », qui stipule dans son article 37 « qu’aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’unité du territoire et à l’intégrité des frontières institutionnellement reconnues… ainsi qu’à l’autonomie des îles », pour contester la légalité de l’avant-projet de loi référendaire portant révision de la constitution.
Au regard de l’avant-projet du président Sambi, le juriste estime que la Cour constitutionnelle devrait user de ses compétences pour s’autosaisir face à toute violation du processus référendaire. Ses membres ont le devoir d’user de ces prérogatives pour déclarer que le projet en question « porte atteinte à l’autonomie des îles » soutient le juriste. Le président de l’Union aurait mieux fait de retirer son projet pour ne pas être accusé « d’acte de forfaiture » a-t-il laissée entendre.
Pour le secrétaire général du parti CRC [Convention pour le renouveau des Comores], Houmed Msaidié, son parti prendra sa position dans le cadre de la coalition de l’opposition, avec les institutions insulaires et l’assemblée de l’Union. Néanmoins, il dira en substance que « le président Sambi doit ouvrir les yeux et observer que le séparatisme a mis ce pays dans une crise née à partir d’Anjouan ». « L’on a vécu cinq ans de conflit de compétence notamment avec Mohamed Bacar et trois ans de fausse promesse avec lui », ajoute-t-il.
« En s’entêtant à organiser ce référendum, il risque surtout de compromettre la paix civile avec son intention de proroger son mandat d’une année ». Houmed Msaidié soupçonne aussi le régime actuel de vouloir « criminaliser les délits d’opinion pour mieux réprimer ses opposants ». Elu au suffrage universel, « Sambi chercherait-il à s’installer confortablement au pouvoir ? » s’interroge le leader de l’ancien parti au pouvoir. Et Msaidié d’ajouter que « la loi n’est pas rétroactive ! ». Pour lui le mandat présidentiel demeure de quatre ans.
A.Nabahane
300109/an/hzkpresse/6h00