Source : Alwatwan.net / 04 novembre
2008
Houmadi Abdallah, Ministre de l'Energie "Il faudrait liquider la Ma-mwe, malheureusement..."
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Depuis un long moment, la Ma-mwe peine à fournir régulièrement l’eau et l’électricité à sa clientèle. Vous comprenez les dommages que cela cause à toute l’économie du pays et à sa clientèle à un moment où l’entreprise publique détient le monopole en la matière…
La Ma-mwe a le monopole, mais ce n’est pas ce monopole qui fait travailler. Il ne faudrait pas oublier qu’elle est un établissement public à caractère industriel et commercial. Quant à ses difficultés d’approvisionnement elle est due à plusieurs choses. D’abord, à l’outil de production. Nous avons des groupes qui tournent à 1500 tours la minute, donc qui consomment beaucoup de gasoil. On estime la consommation à 300 litres par heure. Cette grande consommation s’explique par le fait qu’il s’agit de groupes de dépannage et non pas faits pour tourner 24h /24.
Le deuxième problème de cette société est lié aux recouvrements. La Ma-mwe a du mal à faire payer l’ensemble de sa clientèle. Le troisième problème se situe au niveau de la fraude à l’électricité et aux pertes que subit cette société. En effet, il y a des gens qui consomment du courant électrique et qui ne figurent pas sur la liste des clients. Soit ce sont des branchements illégaux ou de piraterie. Il y a le fait aussi que le réseau est vétuste et engendre de pertes au niveau de la distribution de l’énergie.
Il n’y pas que le courant électrique qui pose problème…
Pour ce qui est du secteur eau, nous reconnaissons qu’il y avait des problèmes, mais depuis quelques mois nous faisons tout pour soutenir la production. Certes, elle n’est pas aussi satisfaisante qu’ille faudrait, parce que notre objectif c’est que les gens arrivent à avoir de l’eau tout le temps, mais je peux dire qu’à l’heure actuelle, la situation n’est pas aussi pire qu’avant. Il y a eu des améliorations dans ce secteur et la Mamwe compte faire plus, dans la mesure où nous avons déjà reçu un don de matériel du gouvernement chinois. Cette offre nous permettra, dans un premier temps, de réhabiliter l’ensemble du réseau de Moroni. Nous aurons alors les moyens non seulement d’augmenter la production mais aussi d’assurer une fourniture permanente de l’eau.
Mais la société a besoin de bien plus que ça, y a-t-il un plan général de redressement?
Comme je viens de vous le dire, la Ma-mwe a de graves problèmes de coût qui font la fragilité de la société, des moteurs qui consomment énormément, des moteurs de dépannage qui fonctionnent 24 heures sur 24 et donc demandent des révisions fréquentes, un réseau de distribution vétuste, de sérieux problèmes de recouvrements. Face à tant de problèmes, je ne pense pas qu’il faille parler de plan de redressement. Ce qu’il faudrait, c’est de liquider cette société et d’en créer une autre qui sera dotée d’un nouvel outil de production. Ça serait l’idéal. Malheureusemnt, ni la Ma-mwe ni le gouvernement n’ont les moyens, aujourd’hui, de mener à bien une telle opération. C’est pourquoi, nous essayerons d’abord de disposer d’un meilleur outil de production. Ce qui sera fait bientôt grâce à un don de groupes électrogènes de nos amis chinois qui vont, par ailleurs, en assurer la maintenance.
Et nous comptons également recevoir des groupes électrogènes, suite à la mission de l’Académie arabe d’Alexandrie (Lire notre avant dernière livraison, Ndlr). L’ensemble de cet équipement va nous permettre de changer notre outil de production. Avec cette mission, nous nous sommes convenus de stabiliser d’abord ce que nous avons et, par la suite, essayer de renouveler le parc. Ces groupes consommeront moins; ce qui permettra de réduire le coût du gasoil.
Le gasoil coûte cher, cela fait dix ans qu’on le répète. Un moment on a envisagé de passer au fuel lourd qui coûterait moins chère…
A ce propos, les gens doivent comprendre une seule chose. Le fuel lourd pourrait effectivement être une solution, mais cela demande des investissements préalables notamment au niveau de la Société Comorienne des Hydrocarbures (Sch) et au niveau de la Ma-mwe pour le stockage de ce carburant. Sans compter des investissements par rapport au transport depuis le lieu d’achat. Donc ce n’est pas aussi facile qu’on semble le croire. Donc, il faut savoir qu’il y a des investissements préalables à faire pour accéder à ce type d’énergie. Il nous faut donc un programme d’investissements et l’Etat ou la Ma-mwe ou les deux doivent mettre la main à la poche. Mais cela ne veut pas dire que ce projet soit totalement abandonné, nous y réfléchissons.
Par contre, je pense que pour un pays comme le nôtre le salut viendra à partir d’autres types d’énergie. Une mission kenyane et des géologues iraniens ont confirmé certaines possibilités par rapport à l’énergie géothermique, notamment à la Grande-Comore. Au niveau de Mohéli et d’Anjouan, il y a les eaux de surface qui pourrait recevoir de petits barrages pour avoir l’énergie hydraulique. Mais là encore, il faut ses études pour pouvoir disposer de ces énergies renouvelables. C’est pourquoi nous avons obtenu de la mission de l’Académie arabe d’Alexandrie qu’il nous fournisse une assistance technique. Et il est prévu que deux techniciens viennent s’installer au ministère de l’Energie pour nous aider à élaborer de telles études.
La Ma-mwe peine à payer son gasoil et l’Etat démarche pour avoir des groupes qui fonctionneront avec ce carburant. Comment expliquez-vous cela ?
A ce propos, l’expérience montre que la Ma-mwe peut payer jusqu’à 70% de sa facture. Si on a pu le faire une première fois, pourquoi ne pourrions nous pas le faire une seconde fois.
Je sais qu’il y a des difficultés de fonctionnement, de logistique à Ma-mwe, mais il est important qu’à la Ma-mwe les gens comprennent que le gasoil est une priorité absolue. C’est cela qui va leur permettre de faire payer les gens et d’être payés eux aussi. Il faut donc qu’on arrive à renouveler la première expérience, ne serait-ce qu’en parvenant à payer les 70% de la facture.
L’électricité coûte très cher aux Comores. Nous avons sans doute l’un des prix les plus chers au monde. Pourtant, le directeur de la Ma-mwe propose une révision à la hausse du prix du kwh pour résorber la crise de l’énergie…
Je comprends l’approche de la Ma-mwe parce que le coût réel du kwh est supérieur aux 120 que les clients payent. Mais il y aussi le côté social qu’on ne peut négliger. Dans cette optique, il a été lancé une opération de recensement dans le but de repérer les anomalies du fichier, mais aussi de faire en sorte que tous les foyers raccordés soient répertoriés. A ce propos, nous demandons aux clients d’être conciliants, car il en va de l’intérêt de tout le monde et tant que il n’y a pas de collaboration entre le gouvernement, la Ma-mwe, les hydrocarbures et les clients rien de bon ne pourra se faire.
Il est vrai que nous produisons l’un des kwh les plus chers au monde, pour pouvoir inverser la tendance, il faut changer l’outil de production, assurer une maintenance régulière du réseau, faire des extensions pour avoir beaucoup de clients. C’est à partir de là que l’on pourrait envisager de réduire sensiblement le prix du kwh. Au ministère de l’Energie et de l’industrie, nous avons fait un choix. L’industrie ne pourrait fonctionner sans l’énergie et si l’énergie est chère les industries auront de coûts d’exploitation élevés. Donc s’il y a quelque chose à faire pour soutenir l’économie, c’est au niveau de l’énergie qu’il faut agit pour la rendre plus permanente et plus accessible.
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La société comorienne des Hydrocarbures qui fut pendant longtemps la vache à lait des différents régimes. Aujourd’hui, elle fait parler d’elle à cause des pénuries.[/b]
La Sch avait un contrat avec Total. Ce contrat a été possible parce que derrière il y avait une lettre de garantie de la Bic. Il y a eu l’affaire Bic/Nicom et la Bic ne fut plus en mesure de donner cette lettre de garantie aux Hydrocarbures. Les difficultés de cette société ont commencé par là. La décision a été prise de rompre avec Total. Nous étions dans une période de pénurie répétitive. L’augmentation du prix du baril de pétrole sur le plan mondial ne nous permettait pas de commander de grandes quantités de carburant. Maintenant la situation est entrain de se stabiliser. Avec les 10.500 tonnes d’hydrocarbures qui viennent d’arriver, nous allons pouvoir stabiliser la consommation et permettre aux Hydrocarbures de sortir la tête de l’eau.
Propos recueillis par M. Y. Kaiva