Agence comorienne de presse (HZK-Presse)
Moroni, mardi 22 juillet 2008 (HZK-Presse) – Après la tenue de la présidentielle d’Anjouan le 29 juin dernier, le représentant résident du PNUD et coordonnateur du Système des Nations Unies à Moroni a accepté de nous parler du processus tel qu’il l’a vécu, les enseignements tirés, ses espoirs pour les Comores et les perspectives qui se dessinent pour le pays.
Question : Monsieur le Représentant, avant de vous demander de nous faire le point sur le processus électoral à Anjouan auquel le PNUD a pris une part active pour sa réalisation, je voudrais savoir ce que vous pensez des propos de M. Mohamed Djaanfari qui dit s’être fait voler la victoire à l’issue de cette élection.
Opia Mensah Kumah : Je suis désolé de ne pouvoir répondre à cette première question. Je ne peux pas commenter les propos de M. Djaanfari. En ce qui concerne le déroulement du processus électoral, je vous dirais seulement que le PNUD a répondu favorablement à la requête qui lui a été faite par le président Sambi et par le gouvernement comorien. Nous sommes heureux et satisfaits que le processus se soit déroulé sans incident, sans problème.
Si nous nous sommes engagés, c’était pour nous assurer de la transparence des élections dans le but de minimiser les tensions. Notre constat est que toutes les mesures nécessaires et utiles pour la réussite de l’opération étaient prises. Il faut dire que la mise en place du Comité de vigilance était une bonne chose. Le Comité fut un outil efficace qui a permis d’enrayer la contestation.
Certes, il n’était pas une structure juridique mais un forum de rencontres et d’échanges sur les différents problèmes qui se posaient tout au long du processus. Il a prouvé de son efficacité et de son intérêt si l’on examine les résultats auxquels nous avons aboutis.
Question : Tel que vous décrivez les choses, c’est comme si aucun problème ne s’était posé…
OMK : Je ne dis pas cela ; je dis que les difficultés ont été amoindries. Exemple : les rumeurs les plus folles qui couraient à Anjouan autour de cette élection, auraient pu mettre le feu partout. Une fois le Comité réuni, la question examinée, tout le monde s’apercevait rapidement que tout était faux.
Réunissant tout le monde (représentants des candidats, ceux des forces de sécurité, la MAES notamment, ceux de la CENI, de la communauté internationale, des ONG et des médias.) l’on s’apercevait très vite que rien de ce qui se disait n’avait aucun fondement réel. Voilà le secret de la réussite dudit Comité. Voilà comment on a évité les problèmes. Disons que le Comité a beaucoup contribué à la réussite du processus.
Pour ce qui est du PNUD, nous avons proposé un slogan, « organisation, préparation et intégrité », qui a porté des fruits. Et pourtant le contexte n’était pas facile avec le temps relativement réduit, l’argent qui faisait défaut, la pénurie de carburant ou une partie du matériel qui devait être fabriquée à l’étranger. En dépit de cette série de difficultés, les choses ne se sont pas déroulées si mal. Il y a eu quelques difficultés mais le plan était bien détaillé et précis. Tout s’est, finalement, bien passé, heureusement. Nous disons nos remerciements au gouvernement et à toux ceux qui ont bien voulu apporter leur contribution pour la réussite de cette élection.
Question : Quelles sont les principales leçons que vous avez tirées de cette élection ?
OMK : Nous avons appris beaucoup. Les bonnes pratiques que nous avons enregistrées peuvent servir ailleurs. Le Comité de vigilance en est de celles-là ; il peut inspirer d’autres ailleurs pour que l’élection exemplaire qui s’est tenue à Anjouan puisse servir de modèle dans d’autres pays ayant connu des problèmes similaires.
Question : Avec cette élection, Anjouan a un président élu en dépit d’une faible participation des électeurs mais, à nous en tenir à votre témoignage, le scrutin a été libre, juste, équitable et transparent. Peut-on considérer, maintenant, la crise terminée?
OMK : Je ne sais pas si la crise est terminée. Mais en signant le décret d’éligibilité des Comores à l’African Growth Opportunity Act (AGOA), dès le lendemain du second tour, le président américain, George Bush, a envoyé un signal fort et très remarqué. Aussitôt après, la Banque Africaine de Développement (BAD) a exprimé sa disponibilité à accompagner les Comores dans ses efforts de développement. Autre signal fort, la venue à Moroni d’une mission de la Banque mondiale (WB) et du Fonds monétaire internationale (FMI) dans l’agenda duquel est déjà inscrite une autre visite pour bientôt. La crise est finie, ce serait trop dire mais je crois que le pays se remet sur les rails.
Je reste convaincu que le pays a besoin de stabilité ; voilà pourquoi le Secrétaire général des Nations Unies a admis l’éligibilité des Comores au Fonds de consolidation de la paix en accordant une enveloppe financière de 5 millions de dollars pour l’après-conflit.
Si les Comoriens se mettent au dialogue pour trouver les arrangements constitutionnels nécessaires pour s’assurer la stabilité dont le pays a besoin, alors il ne resterait qu’à s’atteler à la tâche du développement.
Question : Cette enveloppe du Secrétaire général des Nations Unies dans le cadre de ce Fonds ne pourrait-il pas susciter des frustrations, certains étant susceptibles de penser qu’elle irait seulement à Anjouan, comme l’aide budgétaire récente de la France. N’est-ce pas une autre brèche à l’instabilité ?
OMK : Je ne le crois pas. Cela dépend de la façon dont les Comoriens sauront gérer les choses et prendre la situation en main. Il nous faudrait comprendre que le Fonds de consolidation de la paix n’est pas ouvert à une île particulière mais aux Comores.
Je suis convaincu que tout le monde dans ce pays veut la paix, l’unité, la stabilité et la cohésion. Le dialogue est le seul capable d’assurer et de maintenir tout cela. Personne ne doit avoir peur du dialogue. Un dialogue où les différents interlocuteurs sont tous gagnants. Je ne suis pas de ceux qui croient qu’il y a un perdant et un gagnant dans un dialogue. Tout le monde peut et doit être gagnant. D’ailleurs, une mission est attendue dans les prochains jours pour étudier avec la partie comorienne comment ces fonds pourraient servir efficacement et utilement aux Comores et aux Comoriens.
Personnellement, je ne vois aucune crainte dans l’utilisation de ces fonds. Je répète qu’ils sont destinés à consolider et non le contraire. Il faut savoir que la crise, bien que le champ principal soit l’île d’Anjouan, n’ait affecté que les seuls Anjouanais. N’oublions pas cela.
Bientôt, le gouvernement réunira tous les acteurs concernés pour un briefing sur cette opportunité et voir ce qui pourrait être fait, où et comment. L’essentiel pour ces fonds est d’éviter une rechute dans des conflits. Des pays en ont déjà bénéficiés et les choses ne se sont pas si mal passées.
Propos recueillis par Mohamed Hassani
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