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  • : HALIDI-BLOG-COMORES, Blog des COMORES
  • : BLOG DES COMORES GERE DEPUIS LE 01 DECEMBRE 2013 PAR MARIAMA HALIDI
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A SAVOIR

QU'EST CE QUE LA LANGUE COMORIENNE ?

Pour répondre à cette question pertinente, nous vous proposons ci- dessous l'interview du grand linguiste et spécialiste de la langue comorienne, Mohamed-Ahmed Chamanga

 

 
INTERVIEW DE CHAMANGA PAR RFO EN 2004
 
 
 Le comorien est une langue composée de mots africains, de mots arabes voire parfois de mots portugais et anglais. D'où vient la langue comorienne ?

M.A.C : Le fonds lexical de la langue comorienne est essentiellement « africain » comme vous le dites, et plus précisément bantu. Les emprunts au portugais ou à l'anglais sont relativement faibles. Par contre, l'apport arabe est très important. Cela s'explique par la très forte islamisation des Comores, depuis la Grande Comore(Ngazidja) jusqu'à Mayotte (Maore) en passant par Mohéli (Mwali)et Anjouan (Ndzuwani). Malgré ces emprunts, le comorien (shikomor) reste, sur le plan de sa structure grammaticale, une langue bantu.

Qu'appelle t-on une langue bantu ?

M.A.C : Le bantu est une famille de langues, la plus importante d'Afrique. Les langues qui composent cette famille couvrent pratiquement toute la partie australe du continent noir.

Y a t-il encore aujourd'hui en Afrique ou à Madagascar des populations qui parlent une langue similaire au comorien ?

M.A.C : Bien sûr ! On trouve par exemple le swahili en Tanzanie, le lingala au Congo Démocratique, le kikongo au Congo, le zulu en Afrique du Sud, le shona au Zimbabwe-Mozambique, le tswana au Botswana, le kinyarwanda-kirundi au Rwanda-Burundi, etc. Comme ces langues appartiennent à la même famille, elles ont forcément beaucoup de points communs dans la structure des mots, leurs répartitions dans les phrases, les accords grammaticaux, etc. Elles ont aussi un minimum de vocabulaire commun.
Prenons par exemple le mot bantu ! Ce mot est attesté dans certaines langues, comme le lingala, et il signifie « hommes ». C'est le pluriel du mot muntu qui veut dire « homme » au singulier. Dans d'autres langues, ces mots se déclinent au pluriel en watu (swahili), wantru ou watru ou en encore wandru (shikomor) ; au singulier, nous avons respectivement mtu, muntru, mtru, mndru.
Prenons encore l'exemple de la phrase kinyarwanda suivante qui signifie : « Combien d'hommes ? » : Abantu bangahe ? Nous avons en comorien les équivalences suivantes :Wantru wangapvi ?Watru wangapvi ?Wandru wanga(pvi) ? et en swahili :watu wangapi ?

Ne pensez-vous pas qu'il y a beaucoup de ressemblance dans tout ça ?

M.A.C : A Madagascar, jusqu'au milieu du XXe siècle, il y avait quelques poches bantuphones sur la côte nord-ouest. Mais les langues africaines qui y étaient parlées, le swahili à Marodoka ou le makua à Maintirano, ont aujourd'hui disparu. Le malgache appartient à une autre famille de langues : les langues austronésiennes comme par exemple les langues indonésiennes.

Le comorien est souvent comparé au swahili, parfois on a même dit que le comorien en était dérivé ?

M.A.C: Selon les résultats des recherches des trois dernières décennies, il est prouvé que le comorien et le swahili sont génétiquement issus d'une même souche-mère, d'où leur très grande parenté. Mais les deux langues se seraient séparées aux environs du XIIème siècle. On peut donc dire que ce sont deux langues soeurs. Si la confusion a pu se maintenir jusqu'à une période pas très lointaine, c'était à cause de la très grande proximité des deux langues, mais aussi parce que les sultans des Comores parlaient swahili et beaucoup de correspondances et traités avec les pays voisins ou les puissances étrangères étaient rédigés en swahili qui étaient à l'époque la plus importante langue de communication et du commerce de cette région de l'océan indien occidental.
Par combien de personnes est parlée la langue comorienne?
M.A.C:On peut estimer que la langue comorienne est parlée aujourd'hui par un million de personnes environ : les 750 000 habitants de l'archipel des Comores plus la très importante diaspora comorienne, que l'on peut retrouver notamment à Madagascar, à Zanzibar ou encore en France.

Est-elle enseignée à l'école ? Si non pourquoi ?

M.A.C: Malheureusement, elle ne l'est pas. Pourquoi ? Parce que : Premièrement, la colonisation française, avec sa mission « civilisatrice », n'avait jamais reconnu au peuple dominé une quelconque culture ou civilisation et que les langues des dominées n'étaient pas des langues mais, avec un sens très péjoratif, des dialectes qui n'avaient ni vocabulaire développé ni grammaire.
Deuxièmement, le pouvoir très centralisateur de l'Etat français avait imposé le français comme la seule langue de l'administration partout. Cela était vrai dans les colonies, mais aussi en métropole. C'est ainsi qu'on a banni l'enseignement du breton en Bretagne, du basque au Pays Basque (Sud-Ouest de la France).
Troisièmement enfin, nous avons nous-mêmes fini par admettre que notre langue est pauvre et sans grammaire. Elle ne peut donc pas être enseigné. Il faut encore souligner qu'avec l'instabilité chronique des Comores indépendantes, aucune réflexion sérieuse n'a pu être menée sur la question. Pourtant, les pédagogues sont unanimes : pour permettre l'épanouissement des enfants, il est nécessaire que ces derniers puissent s'exprimer pleinement dans leur langue maternelle...

Y a t-il une ou des langues comoriennes ?

M.A.C:Nous avons la chance d'avoir une seule langue comorienne, depuis Ngazidja jusqu'à Maore. Mais comme toute langue, le comorien se décline en plusieurs dialectes qui en sont les variantes régionales : le shingazidja à la Grande Comore, le shimwali à Mohéli, le shindzuani à Anjouan et le shimaore à Mayotte.

Comment expliquer l'apparition de divers dialectes sur un territoire aussi exiguë que les Comores ?

M.A.C : Ce phénomène n'est pas spécifique au comorien. Toute langue est formée de plusieurs dialectes. La dialectalisation s'accentue lorsqu'il y a peu de communications et d'échanges entre les régions. A l'inverse, le déplacement d'une population qui parle un dialecte donné vers une autre région où l'on parle un autre dialecte peut également entraîner des changements dans les deux dialectes. Pour le cas des Comores, le facteur du peuplement par vagues successives au cours de l'histoire explique aussi le phénomène.
Les différences dialectales peuvent aussi s'observer à l'intérieur de chaque île. C'est ainsi, par exemple en Grande Comore, que la manière de parler des gens de Mbéni dans la région du Hamahamet diffère du parler des gens de Fumbuni dans la région du Mbadjini. Il en est de même à Anjouan entre les gens de Mutsamudu, sur la côte nord, et ceux du Nyumakele, dans le sud-est de l'île, ou encore, à Mayotte, entre Mamoudzou et Kani Bé ou Mwana-Trindri dans le sud, etc.

Un mot sur la langue mahoraise.

M.A.C:Le shimaore appartient au même sous-groupe dialectal que le shindzuani. C'est dire qu'il faut souvent écouter attentivement pour percevoir les différences entre ces deux dialectes. Le shimaore fait ainsi partie intégrante de la langue comorienne.

Le comorien s'enrichit-il ou s'appauvrit-il (avec le phénomène de créolisation de la langue) ?

M.A.C : Parler à l'heure actuelle de créolisation de la langue comorienne est quelque peu exagéré. Certes elle ingurgite aujourd'hui beaucoup de mots d'origine française. Mais cela reste « raisonnable ». Le comorien a emprunté énormément de vocabulaire d'origine arabe, environ entre 30 et 40 % du lexique, pourtant on ne parle pas de créole arabe, et cela à juste titre. En effet, ce qui fonde une langue, ce ne sont pas seulement les mots. Ce sont surtout sa structure grammaticale et sa syntaxe. De ce point de vue, le comorien ne ressemble ni à l'arabe ni au français.
On ne peut pas dire que le comorien s'appauvrit. Essentiellement oral, il répond parfaitement à nos besoins de communication. Il est toutefois évident qu'une langue écrite possède un stock lexical beaucoup plus étendu qu'une langue orale. Ne vous inquiétez pas pour le comorien. Si un jour, on décide de l'écrire, de l'enseigner et de l'utiliser dans l'administration, il ne pourra que s'enrichir. Il s'enrichira en se forgeant des mots nouveaux ou en empruntant d'autres ailleurs, comme cela se fait dans les langues dites de « grande civilisation ».

Où en est actuellement la recherche sur la langue comorienne ?

M.A.C: La recherche sur la langue comorienne avance ; trop lentement peut-être, mais elle avance. Nous avons aujourd'hui une meilleure connaissance sur elle qu'il y a vingt ans. Malheureusement, c'est un domaine qui intéresse peu de monde, aussi bien chez les nationaux que chez les chercheurs étrangers.

Pensez-vous qu'un jour tous les Comoriens parleront la même langue ? Et sur quoi se fonderait cette sédimentation en une seule langue « nationale » ?

Mohamed Ahmed-Chamanga : Nous parlons déjà la même langue. Ce qui nous manque, c'est une langue standard, comme en Tanzanie avec le swahili, à Madagascar avec le malgache, ou en encore au Zimbabwe avec le shona, etc. Pour arriver à ce stade, il faut qu'il y ait une réelle volonté politique, une prise de conscience chez les Comoriens de vouloir mieux apprivoiser leur propre culture et que soit mise en place une équipe de chercheurs qui se pencherait sur la question et qui proposerait cette langue standard qui serait utilisée dans tout l'archipel des Comores.

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CI-DESSOUS LES NEWS  RECENTES  DES COMORES

 

 

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A PROPOS DE OUANI

Ouani et ses grands hommes
 
 
L’être humain est insignifiant puisque le corbeau et beaucoup d’autres espèces d’arbres vivent plus longtemps que lui. De ce court séjour dans ce bas monde à la différence d’autres êtres vivants, l’homme peut marquer de son empreinte l’histoire.
A OUANI, ce genre d’homme malgré sa rareté, a existé et continu à exister jusqu’à nos jours. En ouvrant ce nouveau chapitre, quelques dignitaires en collaboration avec le comité de pilotage de la ville ont tenu à rendre hommage beaucoup d’hommes et de femmes qui ont fait du bien à cette ville.
En dehors de tout jugement, ils ont fait de leur mieux pour que Ouani devienne l’une des grandes villes les plus rayonnantes des Comores et Ouani l’est grâce à eux. Elle doit continuer à l’être pour nous et les générations à venir.
A titre posthume, nous tirons la révérence devant Saïd Toiha (Baco Moegné), Saïd Abdou Bacar Nomane, Saïd Abdou Sidi et Saïd Andria Zafi.
 
Le premier pour avoir créé la première école privée de la ville dans l’objectif de ne plus avoir un enfant de six à sept ans non scolarisé, le second qui a été le premier à être ministre et dont les louanges dépassent les frontières de la ville, le troisième a accompagné plusieurs années la jeunesse et le dernier a beaucoup contribué au niveau de l’enseignement primaire par son dévouement et son engagement à instruire ceux qui l’ont fait pour nous. Cette liste vient de s’ouvrir et n’est pas prête de se fermer ; beaucoup d’autres personnes disparues ou vivant tels que les enseignants apparaîtront à la prochaine édition.
Ansaly Soiffa Abdourrahamane
 
Article paru en 2003 dans le n° 0 de Jouwa, bulletin d’information de OUANI
 
 
 
 
LES ENFANTS DE LA VILLE DE OUANI
ET L’HISTOIRE   DES COMORES
 
 Beaucoup d’enfants de la ville de OUANI ont marqué et marqueront toujours l’histoire de leur pays : les îles Comores.
 
 En voici quelques uns dans différents domaines.
 La liste n’est pas exhaustive
 
 I) LITTERATURE
 
LITTERATURE ORALE
 
ABDEREMANE ABDALLAH dit BAHA PALA
 
Grand connaisseur du passé comorien décédé brusquement en 1988.
Actuellement, un projet de publication de sa biographie est en étude.
On trouve beaucoup de ses témoignages sur l’histoire des Comores dans le tome 2 de l’excellente thèse de SIDI Ainouddine sur la crise foncière à Anjouan soutenue à l’INALCO en 1994 
 
LITTERATURE ECRITE
 
Mohamed Ahmed-CHAMANGA
 
Grand linguiste des Comores
 
 Né à Ouani (Anjouan) en 1952, Mohamed Ahmed-Chamanga, diplômé de swahili et d'arabe, a fait des recherches linguistiques sur sa langue maternelle. Il enseigne la langue et la littérature comorienne à l'Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco). Il est l'auteur d'une thèse, de plusieurs articles, ainsi que d'un recueil de contes de l'île d'Anjouan : Roi, femmes et djinns (CLIF, 1998). Président de l'Association Fraternité Anjouanaise, Mohamed Ahmed-Chamanga a fondé, en 1997, le journal Masiwa.
 Il enseigne actuellement la langue et la littérature comoriennes à l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales de Paris (INALCO).
 
AINOUDINE SIDI
 
 Historien & grand spécialiste de l’histoire foncière des Comores 
 
 Né à OUANI, en 1956. Il a fait des études d’histoire à l’université de DAKAR (SENEGAL) et a préparé un doctorat d’études africaines à l’INALCO (PARIS)  Il est actuellement chercheur et Directeur du CNDRS (Centre National de Documentation et de Recherches Scientifiques) à MORONI.
 
 II) MUSIQUES & CHANTS
 
DHOIFFIR ABDEREMANE
 
Un des fondateurs de l’orchestre JOUJOU des Comores.
Avec ses chansons axées sur la contestation sociale. Il fait partie des premiers artistes qui ont introduit aux années 60 une nouvelle forme de musique aux COMORES.
 
C’est un homme très discret mais plein de talents. On se souviendra toujours de ses productions à la salle AL CAMAR de MORONI.
 
FOUDHOYLA CHAFFI
 
 Une des premières femmes comoriennes à avoir fait partie d’un orchestre musical.
 Il s’agit là d’un engagement incontestable de la part d’une femme comorienne.
 Elle a commencé à jouer un rôle important dans la chanson à partir de 1975 comme chanteuse principale de l’orchestre JOUJOU des Comores.
Sa voix d’or résonne toujours dans le cœur de tous ceux qui ont vécu dans notre pays de 1975 à 1978. On ne passait pas en effet, une seule journée sans entendre une de ses chansons sur l’égalité des sexes, l’unité des Comores, le changement des mentalités… à la radio nationale.
 
 III) POLITIQUE
 
Le sultan ABDALLAH III
 
 De mère ouanienne, il est l’un des grands sultans qui ont régné dans l’archipel des Comores au 18eme siècle et plus précisément sur l’île d’Anjouan.
 
SITTOU RAGHADAT MOHAMED
 
La première femme ministre et élue député des COMORES
 
Né le 06 juillet 1952 à OUANI. Elle a enseigné pendant plusieurs années le français et l’histoire géographie dans différents collèges du pays avant d’être nommée secrétaire d’Etat à la condition féminine et à la population en 1991.
De 1991 à 1996 elle a assumé de hautes responsabilités politiques : Haut commissaire à la condition féminine, Ministres des affaires sociales, conseiller spécial du président de la république, secrétaire général adjoint du gouvernement, élue députée ….
Actuellement, elle est enseignante à l’IFERE et Présidente du FAWECOM.
 
Article publié sur le site de l'AOFFRAC (www.aoffrac.com)
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 

 

5 juillet 2008 6 05 /07 /juillet /2008 01:05

AU REVOIR L’ARTISTE

 Hommage à Ibrahim Saindou[i]

 

La triste nouvelle est tombée le jeudi 19 juin 2008. Aux environs de 18 heures 00 (heure des Comores). Ibrahim Saindou Bacar Nomane nous a quittés à l’âge de 55 ans. Il est mort à l’hôpital de Hombo – Mutsamudu. SON hôpital. C’est un coup dur pour toute la communauté ouanienne et tous ceux qui l’ont connu même s’il fallait s’y attendre compte tenu de son état de santé ; c’est surtout une grosse perte pour Ouani, ses ville et région natales…Anjouan, son île…et les Comores, sa patrie. Ibrahim, en dépit de sa modestie, a, en effet, beaucoup contribué au développement de notre pays et à l’épanouissement de sa ville natale dans différents domaines à sa façon.

 

 

 

 

 

Ibrahim Saindou en 2006 (photo)

 

 

Féru et mordu de musique

 

Né en 1953, tout jeune, il devient « féru et mordu de musique »selon un de ses amis, Abdallah Elhad. En 1969, il fait partie des membres fondateurs du groupe musical « les boutons noirs » et en devient le soliste. Dès 1970, les « boutons noires » intègrent le groupe joujou d’Ouani[ii]. Depuis, Ibrahim, n’a plus quitté sa guitare et son orchestre, excepté pendant ses années d’études supérieures en Algérie.

  Les boutons noirs : de Gauche à droite : Debout : Ibrahim Saindou - Mouslouh - Yahaya ; Assis: Ibrahim Hamza , Baissé :Elhad (photo)


D’aucuns affirment même qu’avec Raslane Abdou Zoubert, il a été le meilleur soliste du groupe musical.

 Mais, c’est de 1975 à 1977 qu’Ibrahim joue un rôle considérable dans la promotion et l’émancipation de la musique et de la chanson comoriennes. En effet, à cette période (sous le règne du Mongozi Ali Soilihi), il devient aussi un des grands auteurs compositeurs du groupe joujou d’Ouani et participe à son apogée et à sa transformation en joujou des Comores[iii]. Il a composé certaines chansons célèbres interprétées par  notre diva nationale, Madame Foudhoiyila[iv],  notamment «  jouwa » dont vous pouvez voir le clip en cliquant ici. C’est dans un style afro-malgache, et indo-arabe  qu’il avait choisi de rythmer ses mélodies. Il a aussi facilité l’intégration et et assuré l’encadrement des jeunes dans le groupe en leur apprenant à jouer à divers instruments musicaux (guitare, synthétiseur, solfège…)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Un poète de la révolution comorienne


  Mais l’analyse des créations ou compositions d’Ibrahim fait apparaître qu’il est, de surcroît, ce que Daniel Ahmed dit Café, un des spécialistes de la littérature orale aux Comores[v] appelle « un poète de la révolution comorienne »[vi]. En effet dans les années 1975-1978 s’est développée aux Comores une poésie révolutionnaire contre le système féodal et aristocratique. Les thèmes abordés dans cette poésie généralement écrite en comorien sont les principes fondamentaux de la révolution Soilihiste. Parmi ses auteurs l’on peut citer entre autres Abou Chihabi, Ali Ben Ali, Dhoiffir  Abdérémane, Raslane Abdou Zoubert et Ibrahim Saïndou[vii]. En effet comme l’a bien démontré Daniel Ahmed[viii], l’on retrouve dans les œuvres d’Ibrahim Saïndou les thèmes du soilihisme : la révolution, l’unité et la nation des Comores, le travail manuel….

Il  concilie à la fois rigueur de forme et sensibilité et fait recours à un langage fluide dans sa poésie.

 
Le premier comorien chirurgien dentiste à Anjouan

 
En 1977, Ibrahim quitte les Comores à destination de l’Algérie pour se former en chirurgie dentaire. De retour dans son pays natal dans les années 80, il retrouve sa guitare et son JOUJOU des Comores. Mais, il devient aussi le premier comorien dentiste à Anjouan. Il a passé toute sa vie professionnelle à l’hôpital de hombo –Mutsamudu auquel il était tant attaché. Son souci primordial était d’améliorer la situation sanitaire de cet établissement et d’aider ses patients. Ceux qui l’ont vu lors de son évacuation sanitaire à l’île de la Réunion en 2003 se rappellent que, allongé sur son lit d’hôpital, au lieu de se préoccuper de son état de santé critique, il attendait impatiemment le passage de ses médecins traitant pour solliciter de l’aide matérielle en faveur de l’hôpital de Hombo. D’ailleurs, il avait pu obtenir quelques équipements qu’il avait mis à la disposition de celui-ci[ix].

Ibrahim a toujours montré à ses patients les qualités d’un homme chaleureux, de grande générosité, de sagesse et d’humanisme. D’autant que pendant plusieurs années, il est resté l’unique chirurgien dentiste sur l’île d’Anjouan.

 

Photo ci dessous : Joujou 1974 : de gauche à droite : Elhad- Yahaya- I. Saindou - Pepsi - I. Hamza sur la piste de l'aéroport de OUANI.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Un passionné des médias et l’ami des jeunes


 En ce qui me concerne, j’ai surtout connu et côtoyé, comme beaucoup de jeunes, un autre Ibrahim Saïndou. Il s’agit du passionné des médias et de l’information qui avait  saisi l’occasion de l’avènement de la démocratie en 1990 aux Comores pour créer la première radio locale de sa région natale. Cette « radio nova » dont toute personne ayant vécu à Ouani dans les années 90 se souvient encore.

« Radio nova » a, en fait,  jouer un rôle très important dans l’information, l’éducation et la sensibilisation des jeunes sur divers sujets vitaux ainsi qu'à la vulgarisation de la culture comorienne
.

 Ce qui m’avait surtout frappé à cette période, c’était le fait qu’il n’avait pas hésité à transformer le salon de son domicile en espace où tous les jeunes qui le souhaitaient, pouvaient  aller animer bénévolement la radio ! C’était vraiment un sacrifice étant donné que dans la société comorienne la mise en valeur du salon est précieuse.

 « Radio nova » a aussi été un moyen incontournable pour les candidats aux élections législatives de la 9ème circonscription en 1992. En mettant gratuitement sa radio à la disposition des candidats pour s’adresser aux électeurs, Ibrahim Saïndou a apporté, à notre avis, sa modeste contribution à l’enracinement de la démocratie dans notre pays. Madame Sittou Raghadat Mohamed, à l’époque candidate à la députation, rend hommage à l’animateur des débats politiques qui était vraiment à l’écoute et à la disposition des intervenants et invités. Selon elle, il n’hésitait pas à prodiguer quelques conseils pour améliorer les prestations des uns et des autres peu importe leurs étiquettes politiques.

 
Après les quelques mois (en 1991 et en 1992) que j’ai passés avec Ibrahim, en tant que présentateur du journal et animateur d’une émission sur l’orientation universitaire des futurs bacheliers à la radio Nova, j’ai gardé particulièrement le souvenir d’un homme qui se souciait beaucoup de l'avenir des jeunes et de la réussite des émissions. Il prêtait attention à tous les détails et au sérieux des animateurs ; un homme ouvert et très proche des jeunes.


 
Voilà l’homme qui a précocement devissé son billard le 19 juin dernier. Le ciel bleu d’ Ouani a perdu ce jour là, une de ses étoiles étincelantes !

 
A travers ces quelques lignes, j’ai tenu juste à rendre à Ibrahim ce qui lui est dû. Car je suis conscient et convaincu que d’autres sont mieux placés pour lui rendre l'hommage qu'il mérite ou parler de lui.


 A Ibrahim


 A l’instar d’Abdallah Elhad et tout ceux qui t’ont connu, je te dis juste ceci : « au revoir l’artiste, tu continueras à vibrer dans nos cœurs »

 
Halidi Allaoui (HALIDI-BLOG-COMORES)
05/07/2008

 

  NOTES :


[i] Mes sincères remerciements à tous ceux qui, par leurs témoignages, m’ont permis de réaliser ce travail : Abdallah Elhad Abdou, Yahaya Ben Saïd Djanffar, Ali Mohamed  Sinane, Antufi  Mohamed  Bacar, Abdallah Abdou Sidi, Jaffar Mohamed Bacar  Nomane, Saïd Ali Daoud (Mdama), Abdallah Daoud, Mouslouhouddine Mohamed, Sittou Raghadat Mohamed… et  tous ceux que j’ai oubliés. Qu'ils m'excusent tout simplement car c'est involontaire.


[ii]
  Pour mieux connaître l’orchestre joujou des Comores, nous vous suggérons le mémoire de fin d’études de l’ENES très intéressant qui lui est consacré dans les années 1990


[iii]
Comme le pays venait d’accéder fraichement à son indépendance (le 06 juillet 1975), l’existence d’un orchestre national pour représenter le pays à un éventuel forum musical international ou régional était indispensable C’est dans cette perspective que les "JOUJOU" se virent attribuer le titre honorifique de "JOUJOU des Comores", à l’issue d’un concours organisé à Moroni. En l’espace de trois ans, ils ont produit une panoplie de chansons célèbres et ont atteint un niveau musical sans précédent : c’était l’apogée.

 [iv] Madame Foudhoiyila, la chanteuse et interprète principale de Joujou des Comores est une des premières femmes (si ce n’est pas la première) à avoir fait partie d’un orchestre musical aux Comores. Elle est la lauréate du Gaboussi d’Or 2001 et est aussi décorée de la médaille du chevalier du  croissant vert le 6 juillet 2005 pour tout ce qu'elle a fait pour la musique comorienne et le combat de sensibilisation patriotique

 [v] Daniel Ahmed a soutenu une thèse de doctorat nouveau régime d’Etudes africaines en 2000 à l’INALCO,  4 vol., 743 p. «  la littérature comorienne de l’île d’ Anjouan. Essai de classification et de traduction des genres littéraires oraux et écrits ».

 [vi] Voir son article intitulé « Ibrahim SAïndou : un poète de la révolution comorienne » publié dans la revue TAREHI n°8 juillet 2003 p7-11.


[vii]
Ces poètes sont cités notamment par DANIEL Ahmed dans un article de 18 pages  intitulé « Ali Ben Ali, poète au service de la révolution comorienne »


[viii]
Voir article précité


[ix]
Témoignage de Saidali Daoud (Mdama)

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commentaires

S
<br /> <br /> Ton talent et tes compétences nous manquent,<br /> Ibrahim Saindou ! 20 janvier 17:01, par Simon AMIR<br /> <br /> <br /> <br /> Lyon, ce 20 janvier 2011<br /> <br /> <br /> J’ai appris depuis peu seulement la nouvelle du décès d’Ibrahim Saïndou, en parcourant récemment quelques blogs comoriens et le vôtre à La Réunion.<br /> <br /> <br /> Près de trois années auront bientôt passé depuis ce triste évènement ; les esprits chagrins estimeront alors dévolu le temps du deuil de ce grand guitariste et artiste anjouannais, doublé<br /> d’un professionnel exemplaire du microcosme de santé comorien.<br /> <br /> <br /> Je souhaiterais néanmoins y revenir d’un mot, ne serait-ce que pour adresser, comme tout à nouveau, ma consolation et mes pensées émues à l’ensemble de sa famille à Ouani, à ses anciens<br /> collègues de l’orchestre Joujou, comme aux nombreux amis qui entretiennent son souvenir de manière affectueuse. Je leur dédie volontiers ces lignes.<br /> <br /> <br /> Oui, en effet, au sein du groupe Joujou, Ibrahim Saïndou a su impressionner quelques générations de collégiens, lycéen-nes (dont je fus) ayant traîné leurs savates et autres chriromanis entre<br /> Ouani et le collège Missiri de Mutsamudu (Anjouan), au cours des années 1970-1975, à moins que ce ne fut à l’internat du lycée Saïd Mohamed Cheikh de Moroni.<br /> Ibrahim Saïndou sut avec brio, style et inventivité prendre le relais de Dhoiffir et Nourredine, ses aînés Ouaniens en matière musicale.<br /> <br /> <br /> Dans ces années de référence, la grouillante jeunesse anjouannaise qui se pressait sur les bancs du collège et du lycée, se prenait déjà à rêver d’un ailleurs qui lui fut meilleur, porteur<br /> d’espérance. Elle sentait sourdement que le caractère propre à son insularité, associé au feu politique couvé sinon alimenté par la quête indépendantiste ambiante, l’abattage socio-médiatique<br /> de slogans de nature à frapper les esprits, de style "M’colo na lawé !" (les puristes auront traduit !) - bref, que ce contexte mouvementé ne laissait guère l’espoir d’augurer un<br /> avenir heureux, version Aldous Huxley.<br /> <br /> <br /> Alors parut Joujou !! Dhoiffir déjà : le matin, à l’heure du départ pour le collège, sa ballade suave amère autour de l’enfant qui pleure donnait le frisson, mettait du baume au coeur<br /> et de l’entrain à l’ouvrage scolaire.<br /> Nourredine nous a aussi comblés de son talent à la guitare sèche, au point de meubler de ses accords mélodieux nos "week-end" de solitude alors que nous étions internes, au lycée de Moroni.<br /> Ibrahim Saïndou nous a tant fait rêver et danser, par ses reprises de classiques occidentaux et africains, comme par la subtilité des compositions "joujouesques" !<br /> <br /> <br /> Un artiste s’en est allé ! J’ai eu le privilège de le côtoyer et d’être de ses amis de jeunesse !<br /> A l’heure du souvenir, je me devais de rendre cet hommage à Ibrahim Saïndou et vous livrer ces bribes de chronique sociale d’un passé aigre-doux qui nous aura marqué de son empreinte et nourri<br /> notre "vivre aujourd’hui".<br /> <br /> <br /> Simon AMIR,<br /> Un créole ayant vécu à Anjouan - COMORES<br /> Lyon - FRANCE<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
M
salut Halidi ,je te remercie de cet hommage très juste de notre frère Ibrahim.quiconque le connaissait de prés ou de loin appréciait sa générosité , sa sagesse et surtout son humour. Une petite anecdoteà ce sujet:Quand sa radio est devenue genante pour le pouvoir en place ANJOUAN ,un matin débarquent chez lui à l'improviste cinq gendarmes lui ordonant de remettre son éméteur sur un ton menaçant ;il leur repond  calemement  et avec une fausse naiveté: Mais pourqoui vous êtes venus à 5 pour un si petit objet??? 
Répondre
M
C'est avec grande tristesse que j'apprends cette malheureuse nouvelles,c'etait un homme généreux,d'une grande sagesse que j'ai connu a la reunion,qui me disait qu'il voulait ramasser des graines de jujube(ntsinavou) pour les planter aux comores car a la reunion ils etaient plus juteux! Qu'allah protege son ame et lui accorde miséricorde!ina lilahi
Répondre

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